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«Nous nous sommes dit que nous ne pouvions plus continuer à être des témoins passifs de ces massacres: nous avons entre nos mains un outil qui pourrait être utilisé pour informer les gens et de lutter contre le phénomène en aidant à forger une nouvelle conscience. »
Franco Zecchin
Originaire de Milan où il est né en 1953, Franco Zecchin a d’abord étudié la physique et obtient une maîtrise en physique nucléaire. Pourtant, c’est en tant que photographe à Palerme en Sicile qu’il débute sa vie professionnelle dans les années 70 et 80. Il a ainsi été confronté à la complexité de la société sicilienne, la dureté des conditions sociales qui prévalent dans l’île, la corruption politique et n’a cessé de dénoncer, avec ses photographies, la violence de la Mafia.
Tout commence en 1974 lorsqu’il fait la rencontre de la photographe Letizia Battaglia, engagée en Sicile dans la lutte anti-Mafia dont il tombe amoureux, il fait alors du théâtre et travaille pour le quotidien de gauche L’Aurora. En 1975, à peine mis le pied à Palerme, Franco, âgé à peine de 22 ans est confronté à son premier cadavre. Tout autour, la foule silencieuse pour qui cette situation représente le quotidien, hypnotisée, regarde. Le jeune photographe n’osera pas photographier. Engagé par le quotidien l’Ora, il aura, dans les années qui suivent, largement de quoi se rattraper… A cette époque, la peur règne dans la villle et l’on ose même pas prononcer le nom de Mafia… Encore moins enquêter et faire paraître des photos de ses crimes. Il choisira de photographier le crime en noir et blanc pour préserver l’aspect dramatique de l’évènement..
Letizia Battaglia et Franco Zecchin
« Notre arme était l’information et nous l’avons utilisée pour briser la transmission d’une culture diffuse du renoncement, de la soumission, du silence, de l’omertà. Nous avons montré aux jeunes la réalité dévastatrice de la mafia, en contraste avec les stéréotypes littéraires et romantiques qui alimentaient le mythe d’une mafia « bonne », qui respectait un code d’honneur, qui défendait et soutenait les plus faibles, en leur garantissant des services que l’état leur refusait. Nous avons cherché à retirer à la mafia le consensus des nouvelles générations » – Franco Zecchin, 1966.
En 1977, il créé avec Letizia Battaglia un Centre Culturel pour la Photographie. Trois années plus tard, en 1980, il est parmi les fondateurs du Centre de Documentation contre la Mafia « G. Impastato ». Il fait également du théâtre et réalise des films à l’hôpital psychiatrique de Palerme. A partir de 1987 il est Directeur responsable du mensuel de culture et politique “Grandevù” édité a Palerme. En 1988 il devient membre « nominé » de l’Agence Magnum. Mais pour Franco Zecchin et Letizia Battaglia, publier quelques photos des crimes de la Mafia dans la presse ne suffit plus, la population semble s’être habituée à cette succession de crimes et ne réagit pas, dans le milieu des années 80, ils osent provoquer la Mafia dans l’un de ses fiefs les plus notoires, la ville de Corleone, et interpeller directement la population : ils exposent sur la place principale de la ville, devant l’église et juste avant la sortie de la messe les photos de victimes de l’honorable société. En quelques minutes, la place se vide de ses occupants qui ont eu peur d’être vus en train de contempler les photos. Ils continueront à exposer le résultat de leur travail partout ailleurs en Sicile, dans les écoles, les centres communautaires, dans la rue... »informer est pour moi une exigence morale », avait coutume de dire Franco Zecchin. Ces actions concoureront à la prise de conscience de la population sicilienne et italienne de la nécessité de mener une lutte contre la Mafia.
Mais le travail Franco Zecchin ne se limite pas à des reportages sur les méfaits sanglants de la Mafia, c’est aussi un photographe sensible et plein d’humanité porté vers la rêverie et la méditation. C’est ainsi que durant son séjour en Sicile, il photographiera de manière à la fois sobre et forte la vie des humbles, de ceux « que l’on ne voit habituellement pas ». Il poursuivra cette quête de l’authenticité et de la vérité dans ses reportages ultérieurs dans le reste du monde. En 1990, il travaille sur un projet engagé socialement, en Silésie, en Pologne, en explorant la pollution et la santé publique. Ill a travaillé également en Afrique du Nord. Il donne une nouvelle orientation à son travail en quittant l’agence Magnum pour réaliser un reportage sur les nomades et passer du temps avec les Touaregs. De cette expérience sortira en 1988 un livre,
Aujourd’hui, Franco vit en France. Son travail est publié dans de nombreux journaux et magazines respectés, y compris Le Monde, Libération, L’Expresset Le Nouvel Observateur.
Ses photos sont incluses dans les collections du Musée International de la Photographie, le Musée d’Art Moderne de New York, la Maison Européenne de la Photographie à Paris, Rochester et dans de nombreuses collections privées
Distinctions, prix et publications
- 1988 Prix International de Journalisme « Città di Trento », Italie.
- Zecchin, F., Battaglia, L. Chroniques Siciliennes, (texte de Marcelle Padovani), Centre National de la Photographie, 1989, Actes Sud, 2000, ISBN 978-2-8675-4053-0
- 2000 « Humanity photo Award 2000 », Beijing, Chine.
- Zecchin, F. Nomades, (avec la collaboration de Pierre Bonte et Henri Guillaume), Editions de la Martinière, 1998, EAN13 : 9782732424217
- Zecchin, F., Battaglia, L. Dovere di Cronaca, Peliti Associati, 2006, ISBN: 88 89412 26 7.
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–––– Les photos de dénonciation de la mafia –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Franco Zecchin – Carnaval à Corleone – 1985
Palerme, Italie, 1983. La femme et les filles de Benedetto Grado sur les lieux du crime. Les femmes portent déjà les vêtements de deuil pour la mort de leur fils et frère Antonio.
Franco Zecchin – Palermo, 1983 – meurtre de Paolo Amodeo.
Franco Zecchin – Palerme, 1982 – Meurtre de Domenico Di Fatta.
Franco Zecchin – Casteldaccia, 1982 – le corps de Ignazio Pedone, kidnappé, assassiné et retrouvé lié dans le coffre d’une voiture.
Franco Zecchin – Palerme 1983 – Meurtre du juge Chinnici, sa fille Elvira.
Franco Zecchin – Palerme 1988. Enterrement de l’agent de police Natale Mondo
Franco Zecchin – Spéculation immobilière sur les hauteurs de Palerme, 1988
Franco Zecchin – Vito Ciancimino (à droite) premier homme politique italien condamné pour être membre de la mafia.
Franco Zecchin – Palerme 1983 : un accusé fait un signe de menace au photographe
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–––– Photos de la Sicile profonde ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Palerme, Italie, 1988. La Confrérie du SS Crucifix défile à place Pretoria
Franco Zecchin – Trapani, 1978 – La procession des « Misteri ».
Franco Zecchin – Palerme, 1982 – Arturo Cassina, chevalier du Saint-Sépulcre.
Franco Zecchin – Palerme, 1985
Franco Zecchin – Palerme, 1983 – Intérieur d’une maison pauvre dans le quartier de Brabcaccio.
Franco Zecchin – Palerme 6 juillet 1981-Intérieur de la place Kalsa, dans le centre historique
Franco Zecchin – Monreale 1979 – l’enfant qui n’est pas allé à l’école
Franco Zecchin – Ganci (Sicile), le dimanche des Rameaux
Franco Zecchin – Ustica, 1986 – Espadon dans un intérieur.
Franco Zecchin – Palermo, 1980 – Voiture populaire et familiale « Lapa ».
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Pour en savoir plus sur Franco Zecchin et son travail sur la mafia, c’est ICI.
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