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Abris rudimentaires de l’habitat paléolithique à structure en A
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Au paléolithique (de -1.8 millions d’années à – 12.000 ans), les ancêtres de la lignée humaine comme Homo habilis ou Homo erectus étaient des cueilleurs-chasseurs nomades. En fonction des saisons et des opportunités de chasse, ils se déplaçaient constamment, ne restant que peu de temps dans un site particulier et n’ont laissé dans ces conditions que peu de traces de leur passage. Certains indices mis en évidence sur le sol par les archéologues comme des empreintes de piquets et de poteaux en bois, des alignements et des pavages de pierres autorisent à penser que des huttes en matériaux périssables ont été alors construites par les hommes pour se protéger durant leur court séjour.
Exemple 1 : site de Terra Amata (Nice), il y a environ 400.000 ans (paléolithique inférieur)
site de Terra Amata (Nice) – reconstitution vue générale hutte (dessin Wilson)
Des traces de huttes rudimentaires au plan toujours ovale, de dimensions 7 à 15 mètres de longueur sur 4 à 6 mètres de largeur ont été relevés dans une petite crique du bord de mer pour des séjours courts que les archéologues estiment avoir été effectués périodiquement à la fin du printemps ou au début de l’automne. Des traces de foyers aménagés au centre des huttes et constitués de dallage en galets et de murets coupe-vent témoignent des prémices de la domestication du feu par l’homme. La structure de l’abri était constituée de piquets de bois ou de branches fichés dans le sol et bloqués par des pierres dont les extrémités supérieures étaient reliées entre elles et attachées par des liens végétaux. Dans ces structures rudimentaires de faible hauteur dans lesquelles on ne pouvait se tenir debout, il n’existait aucun contreventement transversal reliant entre eux les piquets de bois tout au plus une panne longitudinale située au sommet de la hutte supportée par des poteaux
Terra Amata à Nice – essai de reconstitution de hutte
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Exemple 2 : site d’Etioles, – 13.000 ans (paléolithique supérieur)
La découverte d’unités d’habitation associé à des foyers annexes de plein air indique que le site d’Etioles fut un lieu de résidence, un campement avec différents lieux d’activité plus ou moins spécialisés où les Magdaléniens ont effectués des séjours suffisamment longs pour y installer des tentes et organiser leur espace de vie à l’intérieur comme à l’extérieur des habitations. Les unités d’habitation font preuve de variabilité dans leur réalisation : à partir d’un schéma d’organisation stable – un abri circulaire construit autour d’un foyer central qui devait couvrir une surface d’environ 15 m2 avec, en général, au moins deux issues opposées se déclinent plusieurs formules : présence ou absence de pierres participant la construction de la tente (dalles agencées en cercles, alignements de pierres) et aménagements de foyers domestiques variés : grands foyers de pierre ou foyers plus modestes, creusés ou non.
A l’intérieur, on constate une bipartition fonctionnelle de l’espace de part et d’autre du foyer. Toutes les activités de débitage et de façonnage étaient réalisées dans la moitié est de l’abri, tandis que la partie ouest avait des fonctions différentes : près du foyer, les Magdaléniens ont rejeté des pierres éclatées par le feu et ont effectué des travaux domestiques, la préparation alimentaire notamment. Il est également probable que le secteur ouest de l’abri, nettement moins encombré de vestiges, ait été réservé au repos. Le pourtour de l’abri a été inégalement occupé puisque tous les déchets de silex se sont accumulés vers le nord. L’espace externe proche était considéré à la fois comme aire de travail (de débitage, en particulier) et comme une zone d’évacuation où étaient rejetés des déchets provenant de débitages effectués près du foyer
L’habitat des Magdaléniens est adapté à leur mode de vie nomade : des tentes sans doute composées d’une ossature en bois et recouvertes de peaux. Il ne subsiste rien des superstructures, en revanche, des pierres destinées au calage des perches en bois sont parfois conservées et révèlent ainsi le contour de la tente sur le sol.
A noter, dans le sud de la France les magdaléniens utilisaient plutôt des abris sous roche comme lieu d’habitat. Ce type de structure naturelle n’est pas fréquent en Ile-de-France, les magdaléniens ont du s’adapter ! La répartition des vestiges autour des foyers permet de comprendre l’organisation spatiale du campement, et de déterminer ainsi des aires d’activité (zones de taille du silex, zone de vidange des foyers, zone d’habitat…).
Ci-dessus : Reconstitution d’une hutte et de son organisation intérieure – Crédit : Gilles Tosello
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Exemple 3 : site de Pincevent, – 12.000 ans (paléolithique supérieur)
Le site de Pincevent, découvert en 1956 n’a vraiment commencé a être étudié qu’à partir de 1964 par André Leroi-Gourhan. Les datations montrent une occupation des lieux comprise entre – 10 et – 12 300 ans. Ici pas de cercles de pierres, mais des vestiges qui permettent d’imaginer l’existence de parois délimitant des zones d’activité. Des traces des « piquets » ont été mises à jour. Les préhistoriens ont imaginé que des peaux de bêtes étaient tendues sur la structure.
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Exemple 4 : reconstitution d’une cabane mérovingienne du Vie et VIIe siècle à 2 poteaux à Blangy-sur-Bresle (Seine-Maritime, Haute-Normandie)
Sous l’égide de la FATRA (Fédération des Archéologies du Talou et des Régions Avoisinnates) une opération de reconstitution d’un village mérovingien a été engagée. Une première étape fut franchie l’été 2001 par la construction d’un premier habitat rudimentaire constitué d’un fond de cabane et de deux poteaux médians, le tout recouvert de chaume.
Cette cabane s’inspire de données archéologiques existantes, notamment des découvertes faites par l’équipe d’Alain NICE à Goudelancourt-les-Pierrepont ( 02 – Aisne), où un ensemble d’habitats ruraux des VIe et VIIe siècles fut mis à jour. Par ailleurs M. Alain Nice a mis en pratique ses découvertes par la reconstitution d’un village mérovingien à Marles dans l’Aisne également, associé au musée des Temps Barbares. Les photos ci-dessous sont la reconstitution suggérée d’après les structures au sol retrouvées de ce qui était autrefois une cabane à deux poteaux.
La particularité de ce type de cabane est le soutènement par deux poteaux médians encore appelé faîtiers, ainsi que la présence d’un fond excavé de forme quadrangulaire soigneusement aplani. L’ensemble représente une surface d’une dizaine de m², les deux poteaux supportent une faîtière avec un toit d’une inclinaison assez prononcée descendant jusqu’au sol.
L’utilisation de ces cabanes reste obscure ; il est probable que les plus grandes d’entre elles devaient être un habitat ou logement pour les familles les plus modestes de l’époque, les plus petites devaient servir d’étable ou de grange.
étape 1 : réalisation de la fosse et pose des 2 poteaux médians contreventés par 2 fiches obliques et des chevrons
étape 2 : pose des liteaux horizontaux et du revêtement en chaume
Cabane achevée et vue de l’intérieur
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Exemple 5 : site de West Stow (Suffolk), village anglo-saxon du VIIe siècle reconstitué
West Stow est un village et une paroisse civile du Suffolk, en Angleterre. Il est situé à quelques kilomètres au nord de la ville de Bury St Edmunds. Administrativement, il relève du district de St Edmundsbury. Un hameau dont les bâtiments utilisaient les techniques anciennes de construction qu’on imagine avoir été utilisées par les anglo-saxons a été reconstitué sur le site d’une occupation humaine du VIIe siècle étudiées lors de fouilles. Les constructions sont dénommées du nom anglo-saxon de grubenhaus, « maison à fosse ».
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Exemple 6 : site de Bede’s World à Jarrow (Northumberland), village anglo-saxon du VIIIe siècle détruit par les Vikings et reconstitué en partie
Bède le Vénérable était l’un des plus grands érudits de l’Europe médiévale et le premier à enregistrer l’histoire de la nation anglaise. Il a vécu et travaillé comme moine à Jarrow dans le Northumberland. Le lieu où il s’était établi avait été habité précédemment par un groupe tribal anglo-saxon ou une communauté appelée l’Gyrwe (prononcer Yeerweh). Leur nom a été appliqué à la localité ainsi qu’aux personnes et le nom Gyrwe deviendra plus tard Jarrow. Après la mort de Bède le Vénérable, l’église Saint-Paul et le monastère où il vivait seront détruits par ses raids vikings en 794 et 875. Les constructions présentées ci-après sont des reconstitutions des bâtiments d’une ferme anglo-saxonne de l’époque.
Ce bâtiment contient une fosse (« Grube » en allemand), utilisée sans doute pour le stockage des céréales. Le nom donné plus tard pour cette structure aurait pu être grubhouse ou grubhut. Il est basé sur le plan d’un bâtiment découvert par des archéologues à New Bewick dans le Northumberland, bien que les bâtiments similaires de cette période aient été trouvés dans toute l’Europe du Nord. Il est couvert de chaume de bruyère. Gearwe était le nom anglo-saxon pour Jarrow. En grande-Bretagne, le nom générique pour ces types de structure est Pit-house.
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Constructions de l’époque moderne à structure en A dans le monde
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abri de berger en Iran dans la province de Gilan
Les demeures des bergers sont souvent constituées de huttes semi-ovoïdes semi-cylindrique ou faite de branches et recouvert de tissu de crin de chèvre (Parga, Pori, poru). Ces cabanes sont divisées par un mur en bois en deux compartiments, l’un réservé à la famille, l’autre pour le bétail. La cabane est appelé Valar et Gac quand il abrite le mouton et la chèvre, respectivement.
John Thomson – refuge de montagne dans la province chinoise de Hupeh, avant 1898
Deux constructions agricoles archaïques à structure en A photographiées aux Pays-bas (dates et lieux inconnus)
Art rupestre du Val Camonica en Italie – (Foto Luca Giarelli)
Iran – maison de 2 étages avec plancher bas décollé du sol dans le delta du Safidrud (mer Caspienne), 1974
Japon – Village de Shirakawa, Gifu : grange (à gauche) et maisons d’habitation anciennes
Minka (nom de la maison traditionnelle au Japon) à toiture Kirizuma à 2 pans touchant presque le sol formant un angle aigu
Maisons typiques de l’île de Madère
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Les maisons contemporaines de type A-frame (maisons à charpentes en A)
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Une maison A-frame fait référence à un style architectural contemporain où la toiture composée de deux pans est fortement inclinée et descend totalement ou presque totalement jusqu’au sol. Les chevrons formant la structure de la toiture sont contreventés par une structure horizontale formant entrait) ce qui donne à la structure d’ensemble une forme de A.
Bien que ce type de structure ait été très utilisé dans le passé, comme le montre les exemples présentés ci-dessus, partout dans le monde, il est revenu au goût du jour dans l’architecture occidentale dans les années cinquante pour la construction de maisons de vacances. Ces constructions présentaient alors l’avantage d’être économiques du fait de leur simplicité de structure et d’offrir une nouveauté de forme qui tranchait avec l’architecture normalisée des constructions d’habitation de l’époque. C’est l’architecte Andrew Geller avec la Reese House construite en 1955 sur la plage de Long Island à New York et médiatisée par le New York Times en 1957 qui a lancé la mode de ce type d’architecture qui s’est répandue ensuite comme une trainée de poudre.
Andrew Geller – Maison de plage Reese à Long Island, 1955
maison passive triangulaire à Auvilliers (Normandie) – architecte Jean-Baptiste Barache
L’architecte a résolu intelligemment le problème du passage entre la structure intégrale en A et la structure en A posée sur des murs verticaux porteurs en utilisant des fermes en lamellé collé dont la courbure au niveau du sol rencontre celui-ci perpendiculairement. La lecture extérieure de l’architecture des façades longitudinales est celle d’une maison classique avec murs verticaux. Par contre, la lecture des façades pignons et des volumes intérieurs est celle d’une structure en A.
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articles liés :
- organisation et appréhension de l’espace en Grèce antique : (I) formes d’habitat et d’occupation, c’est ICI
- archéologie de l’habitat : utilisation contemporaine de la fourche porteuse ou « paufourche« , c’est ICI
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