poèmes d’amour de l’Égypte ancienne

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Chants d’amour de l’Egypte ancienne
aux éditions La Table Ronde

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Buste d’Egyptienne – musée du Louvre

L’unique

L’unique, la bien-aimée, la sans pareille,
La plus belle du monde,
regarde la, semblable à l’étoile brillante de l’an nouveau,
au seuil d’une belle année.

Celle dont les reins sont alanguis, et les hanches minces,
celle dont les jambes défendent la beauté,
celle dont la démarche est pleine de noblesse,

lorsqu’elle pose ses pieds sur la terre,
de son baiser me prend le coeur

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Fais un jour heureux.

Fais un jour heureux.
Respire en même temps le baume et le parfum le meilleur.
Les guirlandes de lotus et de fruits de mandragore sur la gorge de ta femme,
Celle qui est dans ton coeur et est assise à ton côté ;
Qu’il y ait devant ton visage du chant et de la musique !
Rejette loin de toi le souci. Songe à te réjouir
Jusqu’à ce que vienne ce jour d’aborder à la terre qui aime le silence !

L’unique, la bien-aimée, la sans-pareille,
La plus belle du monde
Regarde-la, semblable à l’étoile brillante de l’an nouveau,
Au seuil d’une belle année.

couple

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Nefertiti

p139

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Chant de la grande joie du cœur

Celle dont brille la grâce, dont la peau rayonne,
A des yeux au regard clair,
Et des lèvres au doux parler.
Jamais elle ne prononce une parole superflue.

Elle, dont le cou est long, la poitrine lumineuse,
Possède une chevelure de lapis véritable.
Ses bras surpassent l’éclat de l’or,
Ses doigts sont semblables aux calices de lotus.
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La bouche de ma soeur est un bouton de lotus,
Ses seins sont des pommes d’amour,
Ses bras sont des étaux,
Son front est le cerceau de l’acacia
Et moi je suis l’oie sauvage.
Mes regards montent vers sa chevelure, un appât,
Et je suis pris dans le piège.

Chants d’amour de l’Egypte ancienne
aux éditions La Table Ronde

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Histoire de genre ou « À la recherche éperdue de notre moitié… »

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Platon

Platon (428 av. JC – 347 av. JC)

L’un et l’autre,
L’un sans l’autre,
L’un est l’autre                     Elisabeth Badinter

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– Dans Le Banquet de Platon, Aristophane affirme que dans le monde mythique d’autrefois il existait trois types d’êtres humains. Tu connais cette histoire ?
– Non.
– Autrefois, les êtres humains ne naissaient pas homme ou femme, mais homme/homme, homme/femme ou femme/femme. Autrement dit, il fallait réunir deux personnes d’aujourd’hui pour en faire une seule. Tout le monde était satisfait comme ça, et la vie se déroulait paisiblement. Mais Dieu a pris une épée et a coupé tous les êtres en deux bien nettement, par le milieu. Résultat : il y a eu des hommes et des femmes, et les gens se sont mis à courir dans tous les sens toute leur vie à la recherche de leur moitié perdue.

– Pourquoi Dieu a-t-Il fait ça ?

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– Couper les gens en deux ? Je n’en sais rien, moi. Ce que fait Dieu est généralement assez incompréhensible. Il se met facilement en colère et puis, comment dire, Il a une tendance à l’idéalisme. J’imagine que c’était une punition. Comme dans la Bible, quand Il a chassé Adam et Eve du paradis.
– Le péché originel, dis-je.
– Oui, le péché originel. (Il tient son crayon en équilibre entre l’index et le majeur et le fait osciller lentement.) En fait, je voulais dire que c’est difficile pour un humain de vivre seul.
Je retourne dans la salle de lecture lire la suite de l’histoire d’Abou-Assan le bouffon. Mais j’ai du mal à me concentrer. Homme/homme, homme/femme ou femme/femme ?
(H. Murakami, Kafka sur le rivage, p. 52-53)

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Platon : discours d’Aristophane sur Eros dans Le Banquet

Le Banquet est considéré comme un ouvrage datant de la période de maturité de Platon, il expose l’origine, la nature et la portée philosophiques du désir et de l’amour.   Un disciple de SocrateAppollodore, est le narrateur de propos échangés à un banquet. Cinq éloges sur le thème de l’amour sont ainsi exposé par Appollodore sous la forme de cinq discours :
          . discours de Phèdre (178a-180a)
          . discours de Pausanias (180e-185e)
          . discours d’Eryximaque (185e-188e)
          . discours d’Aristophane (189a-193e). C’est de ce discours que nous traiterons dans cet article.
          . discours d’Agathon (195a-198a)

Agathon jeune poète couronné, disciple de Gorgfias, et organisateur de la réception. Il a obtenu le premier prix au concours des Lénéennes de 416 av. JC; il s’agissait de sa toute première représentation, et c’est ce jour-là qu’il a donné le festin dont Platon s’est inspiré pour situer le Banquet.
Aristophane : poète comique à succès
Eryximaque : Médecin fils d’Acoumène (médecin comme lui) : érudit et pédant, organisateur du tour d’éloges d’Éros
Pausanias : amant d’Agathon ; il fait l’éloge de l’homosexualité et de la pédérastie ; il suit son amant lorsque celui-ci quitte Athènes (-408/-407). Sa sensualité est proverbiale à Athènes : il a une réputation de grossier, mais fait preuve de raffinement dans le discours
Phèdre : Jeune athénien brillant et riche, fils de Pythoclès du dème de Myrrhinonte, il accompagne Socrate dans le Phèdre, dialogue platonicien éponyme 

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Court métrage de Pascal Szidon d’après le Banquet de Platon (189d-191d). Voix d’Aristophane : Jean-François Balmer. Traduction : Luc Brisson.

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Le discours d’Aristophane (189d-193d)

      « Tu sais, Eryximaque« , reprit Aristophane, « J’ai l’intention de parler de l’amour tout autrement que toi et que Pausanias : il me semble que les hommes ont tout à fait ignoré la puissance d’Éros; s’ils la connaissaient, ils lui construiraient des temples grandioses et des autels, lui feraient des sacrifices somptueux; pour le moment, rien de tel en son honneur, alors qu’il le faudrait par-dessus tout.

     Il est, de tous les dieux, le plus philanthrope, le protecteur des humains, et médecin de maux qui, s’ils étaient guéris, le plus parfait bonheur en résulterait pour la race des hommes. Je tenterai donc de vous exposer sa puissance, et vous l’enseignerez ensuite aux autres. Mais il vous faut d’abord apprendre la nature humaine et ses passions. En effet, notre nature originelle n’était pas ce qu’elle est aujourd’hui, loin de là.
     D’abord il y avait trois genres, chez les hommes, et non pas deux comme aujourd’hui, le masculin et le féminin; un troisième était composé des deux autres: le nom en a subsisté, mais la chose a disparu : alors le réel androgyne, espèce et nom, réunissait en un seul être le principe mâle et le principe femelle; il n’en est plus ainsi, et le nom seul est demeuré, comme une injure. Ensuite, chaque homme avait la forme d’une sphère, avec le dos et les côtes en arc, quatre mains, autant de jambes, et deux faces reliées à un cou arrondi, tout à fait identiques; pour ces deux faces opposées, un seul crâne, mais quatre oreilles, les pudenda en double, et tout le reste, que l’on peut imaginer, sur le même modèle. Notre homme pouvait se promener où il voulait, comme aujourd’hui, en station droite; et quand il éprouvait le besoin de courir, il s’y prenait comme nos équilibristes qui font la grande roue en lançant leurs jambes en l’air : grâce aux huit membres sur lesquels ils prenaient appui, ils avançaient très vite en roulant. S’il y avait trois genres, et tels que j’ai dit, c’est que le premier, le mâle, était originellement fils du soleil, le second, femelle, tiré de la terre, et le troisième, participant des deux, de la lune, parce que la lune aussi a cette double participation.

    Ils avaient, je l’ai dit, une forme sphérique, et se déplaçaient circulairement, de par leur origine; de là aussi venaient leur force terrible et leur vigueur. Ayant alors conçu de superbes pensées, ils entreprirent contre les dieux, et ce que dit Homère d’Éphialte et d’Otos, que ceux-ci entreprirent de monter jusqu’au ciel pour attaquer les divins, on le dit aussi d’eux. Alors Zeus et les autres dieux délibérèrent sur le châtiment à leur infliger, et ils ne savaient que faire : pas moyen de les tuer, comme pour les géants, de les foudroyer et d’anéantir leur race – ce serait supprimer les honneurs et le culte que leur rendent les hommes – ni de tolérer leur insolence.

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    Après une pénible méditation, Jupiter donna enfin son avis:  » Je crois qu’il y a un moyen pour qu’il reste des hommes et que pourtant, devenus moins forts, ceux-ci soient délivrés de leur démesure; je m’en vais couper chacun en deux, ils deviendront plus faibles, et, du même coup, leur nombre étant grossi, ils nous seront plus utiles; deux membres leur suffiront pour marcher; et s’ils nous semblent récidiver dans l’impudence, je les couperai encore en deux, de telle sorte qu’il leur faudra avancer à cloche-pied.  » Sitôt dit, sitôt fait : Zeus coupa les hommes en deux, comme on coupe la comme pour la faire sécher, ou l’oeuf dur avec un cheveu. Chacun ainsi divisé, il prescrivit à Apollon de lui tourner le visage, et sa moitié de cou du côté de la coupure, afin qu’à se bien voir ainsi coupé, I’homme prît le sens de la mesure; pour le reste qu’il le guérît ! Apollon donc retourna le visage, et tira de partout sur cc qu’on appelle maintenant le ventre, serra comme sur le cordon d’une bourse autour de l’unique ouverture qui restait, et ce fut ce qui est maintenant appelé le nombril. Quant aux plis que cela faisait, il les effaça pour la plupart, il modela la poitrine, avec un outil assez semblable à celui dont usent les cordonniers pour aplanir les cuirs sur la forme; mais il laissa quelques plis, sur le ventre, autour du nombril, destinés à lui rappeler ce qu’il avait subi à l’origine.

     Une fois accomplie cette division de la nature primitive, voilà que chaque moitié, désirant l’autre, allait à elle; et les couples, tendant les bras, s’agrippant dans le désir de se réunir, mouraient de faim et aussi de paresse, car ils ne voulaient rien faire dans l’état de séparation. Lorsqu’une moitié périssait, la seconde, abandonnée, en recherchait une autre à qui s’agripper, soit qu’elle fût une moitié de femme complète – ce que nous appelons femme aujourd’hui -, soit la moitié d’un homme, et la race s’éteignait ainsi.

     Pris de pitié, Zeus imagine alors un moyen : il déplace leurs sexes et les met par devant – jusque-là ils les avaient par derrière, engendrant et se reproduisant non les uns grâce aux autres, mais dans la terre comme font les cigales. Il réalisa donc ce déplacement vers l’avant, qui leur permit de se reproduire entre eux, par pénétration du mâle dans la femelle, et voici pourquoi : si, dans l’accouplement, un mâle rencontrait une femelle, cette union féconde propagerait la race des hommes; si un mâle rencontrait un mâle, ils en auraient bien vite assez, et pendant les pauses, ils s’orienteraient vers le travail et la recherche des moyens de subsister. De fait, c’est depuis lors, que l’amour mutuel est inné aux hommes, qu’il réassemble leur nature primitive, s’attache à restituer l’un à partir du deux, et à la guérir, cette nature humaine blessée.

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     Chacun de nous est donc comme un signe de reconnaissance, la moitié d’une pièce, puisqu’on nous a découpés comme les soles en deux parts; et chacun va cherchant l’autre moitié de sa pièce : tous ceux, alors, parmi les hommes, qui proviennent de l’espèce totale, de ce que l’on appelait l’androgyne, aimant les femmes; la plupart des hommes adultères ont même origine, ainsi que les femmes qui aimant les hommes et celles qui trompent leurs maris. Pour les femmes qui sont issues de la division d’une femme primitive, elles ne prêtent pas spontanément attention aux hommes, se tournent plu tôt vers les autres femmes, et ce sont nos tribades. Enfin, tous ceux qui proviennent de la division d’un pur mâle, ceux-là chassent le mâle; tant qu’ils sont enfants, en vraies petites tranches de mâle, ils recherchent les adultes, aiment à coucher avec eux et se faire embrasser, et ce sont les meilleurs, entre les garçons et les jeunes gens, parce que les plus proches du courage viril; on a tort de les dire impudiques; ce n’est pas l’impudeur qui les meut mais la hardiesse, le courage, la crânerie virile, dans la recherche de ce qui leur ressemble; et en voici une bonne preuve : au terme de leur développement, ils sont les seuls à s’occuper de politique; à l’âge viril, ils aiment les garçons, et s’ils songent à se marier, à faire des enfants, ce n’est pas spontanément, mais sous la contrainte de l’usage; leurs goûts les portent plutôt à vivre entre eux, et sans mariage, de toute nécessité, un homme de cette espèce doit aimer les garçons et rechercher l’amour, en s’attachant à ce qui a même origine que lui.

    Ainsi lorsque les amants – amoureux des garçons, ou dans tout autre amour – ont rencontré justement la moitié qui est la leur, c’est miracle comme ils sont empoignés par la tendresse, le sentiment de parenté, et l’amour; ils ne consentent plus à se diviser l’un de l’autre, pour ainsi dire, même un instant. Et tels sont bien ceux qui demeurent ensemble jusqu’au terme de leur vie, et qui ils pourraient même pas définir ce qu’ils attendent l’un de l’autre ! Il est invraisemblable que la jouissance physique explique leur si vif désir d’être ensemble : leurs âmes, de toute évidence, désirent autre chose, qu’ils ne peuvent pas dire, mais qu’ils pressentent et insinuent. Si Héphaistos, lorsqu’ils se tiennent ensemble, leur apparaissait, tenant ses outils et leur disait:  » hommes ! que cherchez-vous à devenir en vous unissant ainsi ? «  … et si, devant leur embarras il leur demandait, de nouveau:  » n’est-ce pas là votre désir, de vous assimiler l’un à l’autre autant que possible, et de ne vous quitter ni la nuit ni le jour ? Si c’est bien ce que vous voulez, je veux bien, moi, vous fondre ensemble, vous river l’un à l’autre, et des deux que vous êtes faire un seul : ainsi tant que vous vivrez, ce sera comme un seul être d’une commune vie, et lorsque vous mourrez, même là-bas, chez Hadès, vous ne serez pas deux morts, mais une ombre unique. Réflechissez, si c’est là votre amour et si cet avenir vous comble…  »

     Alors nous savons bien qu’en réponse aucun amant ne dirait non, ni ne manifesterait d’autre désir; il croirait avoir entendu la simple expression de son propre désir d’une réunion et combinaison en un seul, de deux qu’ils étaient, avec ce qu’il aime. La cause s’en trouve dans notre primitive nature, dans la totalité qui faisait notre être; et le désir, la chasse de cette totalité s’appelle l’amour; auparavant, je l’affirme, nous étions un, et maintenant, pour notre injustice, nous avons été divisés par les dieux, comme les Arcadiens par Lacédémone. Il est donc à redouter, si nous manquons de mesure à l’égard des dieux, qu’ils ne nous coupent derechef en deux, et que nous ne restions semblables à ces figures sur les stèles, coupées suivant le profil du nez, ou comme les demi-jetons qui permettent de se reconnaître ! Autant de motifs qui engagent tout homme à la piété envers les dieux, et à y exhorter son prochain, afin d’échapper à cc que l’on redoute et d’atteindre ce que l’on désire, comme fait Éros notre guide et notre chef, que nul n’entre en conflit avec lui – et ce conflit éclate dès que nous concourons la haine divine – mais si nous retrouvons les faveurs du dieu, si nous nous réconcilions avec lui, nous découvrirons et approcherons l’autre partie de nous-mêmes nos amours, aventure qui arrive à bien peu aujourd’hui ! Et je prie Éryximaque de ne pas faire le railleur en prétendant que je veux parler de Pausanias et d’Agathon – peut-être bien qu’ils sont du nombre de ceux dont je parle, et que tous deux possèdent cette nature mâle – mais je parle de tous hommes et femmes, et j’assure que notre race atteindrait au bonheur si seulement nous allions au bout de notre amour, et si chacun, rencontrant les amours qui sont faites pour lui, revenait à sa nature originelle. Si tel est le bien suprême, nécessairement, parmi tous les objectifs aujourd’hui à notre portée, celui qui s’en rapproche le plus est le plus beau : et c’est de rencontrer l’ami naturel de son coeur. Notre hymne à la cause divine de cette rencontre, comment ne monterait-il pas vers Éros qui présentement nous est le plus utile, car il nous guide vers ce qui est fait pour nous et, quant à l’avenir, si nous gardons la piété envers les dieux, il nous apporte l’espérance supérieure d’une restitution de notre nature originelle, d’une guérison qui nous donnera le bonheur et la joie ? »

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     Ainsi, selon ce texte, il existerait dans ce monde, un double, une part manquante de nous-même que nous devrions impérativement retrouver pour reconstituer notre intégrité première, notre unicité perdue. Le désir, l’amour, seraient issus de la nostalgie de cette complétude des origines et ceux qui ne  retrouveraient pas leur moitié resteraient des êtres incomplets et inaccomplis, frustrés et malheureux. Ce désir de fusion ne trouve pas sa source et sa finalité dans les seuls délices de « l’union sexuelle » mais est une union totale de type symbiotique qui vise à reconstituer l’unité première. Que de malheurs et de désespoirs ont résultés de cette interprétation des rapports humains façonnée par ce mythe. Toute la culture occidentale sera marquée par cette recherche éperdue qui sous le nom d’amour idéal et absolu, ou d’amour «romantique» conditionnera les relations à l’intérieur des couples. La plupart de nous n’en sommes pas sortis et cela reste l’une des illusions les plus chères au cœur de l’homme.

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Sites et articles liés

  • PHILILOG – Le mythe de l’androgyne. Commentaire par Simone Manon : c’est  ICI
  • Le Banquet – Philosophie par Danielle Desbornes : c’est  ICI
  • RURSUS – L’extension du vocabulaire de la beauté dans le De amorce, IV, de Marsile Ficin, par Evrard Delbey,  c’est  ICI
  • Le banquet de Platon lu par Jacques Lacan par Maria Salmon et Marc Zerbib : c’est  ICI
  • Platon, Le Banquet – Présentation et traduction par Luc Brisson (GF Flammarion) : c’est  ICI

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Tout cela et rien

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Dave Gahan & Soulsavers, « Angels & Ghosts » : All Of This And Nothing

Dave Gahan, le chanteur de Depeche Mode a publié en 2015 un nouvel album avec les Soulsavers, « Angels & Ghosts ». Le single interprété ci-dessus est « All Of This And Nothing »

All Of This And Nothing

Sing out you song, Sing out for me
Give it everything you got, just one more time for me
moving from the dark
I’m all of this and nothing
i’m the dirt beneath your feet
i’m the sound that rises while you’re sleeping
i’m all
The rivers wide too wide to see
There’s a storm outside my window moving close to me
Moving from the dark
I’m all of this and nothing
i’m the dirt beneath your feet
I’m the sound that rises while you’re sleeping
I’m all
Black water high too high to breathe
there’s a ghost outside my window haunting me
Moving from the dark
Moving from the dark
I’m all of this and nothing
i’m the dirt beneath your feet
i’m the sound that rises while you’re sleeping
i’m all
I’m all of this and nothing
i’m the dirt beneath your feet
i’m the sound that rises while you’re sleeping
i’m all
Moving from the dark
Moving from the dark

Dave-Gahan-Angels-Ghosts

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meraviglia : Northern Lights

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Northern Lights : Aurores boréales

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Tom Thomson – Northern Lights, Printemps 1917

TomThomson (1877-1917)        « Do you see the northern lights? Yes Tom, I said, they’re very brilliant tonight. And he wound his hands, and out he’d go, and stand. And I kept on a roaring good fire, and Tom’d come in, warm his hands again, five below zero, and out he’d go. And just gaze at them. Finally about eleven thirty it would be, he said, I believe I can put that on canvas. Now, that « Northern Lights » was painted partly by lamp light, and walking out and lookin’ at it. How he did it, no one knows but Tom Thomson. »                      Mark Robinson, 1952 – Interview

 

Tom Thomson - Northern Lights - Eté 1915

Tom Thomson – Northern Lights, été 1917

Tom Thomson - Northern Lights, Printemps 1916

Tom Thomson – Northern Lights, Printemps 1916

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Regards croisés

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China, 1982

Chine, 1982

The Heart’s Counting Knows Only One

In Sung China,
two monks friends for sixty years
watched the geese pass.
Where are they going?
one tested the other, who couldn’t say.

That moment’s silence continues.

No one will study their friendship
in the koan-books of insight.
No one will remember their names.

I think of them sometimes,
standing, perplexed by sadness,
goose-down sewn into their quilted autumn robes.

Almost swallowed by the vastness of the mountains,
but not yet.

As the barely audible
geese are not yet swallowed;
as even we, my love, will not entirely be lost.

Jane Hirshfield, The Lives of the Heart, 1997
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​​Un homme sous les pins - dit être par Ma Yuan, M. Magoshi Kyohei, Tokyo

Ma Yuan (?) – Un homme sous les pins

Le cœur ne bat que pour l’Unique. 

Dans la Chine de la Dynastie Song
Deux moines, amis de soixante années
regardent les oies passer.
Où vont-elles ?
Demande l’un à l’autre qui ne peut rien répondre.

Le silence de ce moment s’éternise.

Jamais personne n’étudiera leur amitié
dans les recueils de Gong’an* savants.
Personne ne se souviendra de leurs noms.

Je les imagine quelquefois,
figés, attristés de leur ignorance,
emmitouflés dans leur robes d’automne cousues de duvet d’oie.

Presque avalés par l’immensité de la montagne,
mais pas tout à fait.

Tout comme les à peine audibles
oies n’ont pas encore été avalées;
alors même que nous, mon amour,
ne serons jamais tout à fait perdus.

Traduction Enki, Janvier 2015

Merci à Sylvie Durbec de m’avoir mis sur la voie de ce délicieux poème fait de brumes, de silence, d’éternité et en même temps plein d’humour de Jane Hirshfield et que je prie de bien vouloir m’excuser de l’avoir trahi en tentant de le traduire…

Koan : En japonais, un Koan est la traduction du mot chinois Gong’an qui est un dossier, un récit, un dialogue, une question ou une déclaration utilisés dans la pratique du Zen pour provoquer une « grande interrogation » et tester le progrès de l’élève.

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T’inquiètes pas, petit homme – On t’aime…

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Tendresse

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Sauve qui peut !

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sauve qui peut !

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Apparitions…

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« Si les portes de la perception étaient nettoyées, chaque chose apparaîtraient à l’homme comme elle est, infinie. »
                                    William Blake

William Blake - Ghost of a Flea, around 1819

William Blake – Ghost of a flea, 1819-1820

       Durant sa vie, les gravures de Blake ont été décrites comme étant l’œuvre d’un fou. Ce point de vue s’est renforcé lorsque l’on a appris que le peintre était inspiré par des visions. D’après Blake le fantôme de la puce lui aurait révélé, lors d’une vision, que les puces sont habitées par les âmes d’hommes qui auraient été, dans leur vie passée, excessivement sanguinaires. Le fantôme possède à la fois des traits humains et animaux, avec sa tête trop petite par rapport à son corps, son cou massif de taureau, ses oreilles en pointe, sa peau de reptile et sa langue venimeuse jaillissant de sa bouche comme si elle voulait laper le contenu d’un bol de sang que ses yeux exorbités lorgnent avec avidité.

       Ghost of a flea (le fantôme d’une puce) est l’une des plus petites peinture réalisée par le peintre et graveur britannique William Blake (1757-1827). Il mesure en effet 21,4 cm x 16,2 cm et a été exécuté sur un panneau d’acajou dans une tempera comportant des particules d’or. Le tableau fait partie d’une série de planches illustrant le livre écrit sur les « chefs visionnaires » qui avait été commandée par son ami, l’astrologue et aquarelliste John Varley (1788-1842). Tout comme Blake, Varley croyait dans l’existence des esprits mais à la différence de Blake qui déclarait avoir déjà vu des esprits, Varley était incapable de les voir et demandait à son ami de le décrire et le représenter.
    Alexander Gilchrist, le biographe victorien de Blake a écrit qu’aux alentours de 1790 celui-ci avait clairement entrevu un spectre : « Debout, un soir, à l’entrée du jardin de sa maison de Lambeth, il avait aperçu une figure sombre et horrible, écailleuse, mouchetée, abominable, descendant les escaliers et se dirigeant vers lui. Effrayé comme jamais il ne l’avait été, il prit les jambes à son cou et sortit de la maison en courant ». Blake se plaisait à raconter que, petit enfant, il avait vu un arbre « rempli d’anges et d’ailes d’anges brillantes décorant chaque branche comme des étoiles. » Les deux amis se réunissaient souvent jusque tard dans la nuit dans la maison de Varley pour des séances d’occultisme où ils essayaient d’entrer en contact avec l’esprit d’un personnage historique ou mythologique.

     Varley raconte que l’image du fantôme de la puce serait venu à Blake en 1819 au cours de l’une de ces soirées :  « Comme je tenais à mener l’enquête de la manière la plus véridique possible sur  ces visions et sur l’audition de cette apparition spirituelle d’une puce, je lui ai demandé (à Blake) si il pouvait dessiner ce qui lui était apparu de la manière la plus ressemblante possible.  Il déclara alors instantanément : « Je le vois maintenant devant moi. » Je lui ai donc donné du papier et un crayon et il en a dessiné le portrait … je me sentais totalement convaincu, par la manière dont il dessinait, qu’il avait bien une image réelle devant lui, car ayant un moment abandonné son dessin et en ayant commencé un autre sur une autre partie du document pour représenter la bouche de la puce que l’esprit venait d’ouvrir, il avait été empêché de terminer la première esquisse jusqu’au moment où celui-ci avait refermé la bouche. »

ience est trompeuse, toute démonstration mensongère. Chaque homme doit aimer ; il doit cultiver son imagination, son « génie poétique », ce don merveilleux que nous recevons tous en naissant, que nous possé- dons encore dans l'âge heureux de l'innocence, et que seule une fausse expérience nous empêche de développer. Ainsi, nous nous sauverons nous-mêmes, et nous contribuerons au salut de l'humanité. Chacun sera « le Rédempteur ». Les théologiens du moyen Age, sans nier la valeur historique de l'Ancien Testament, y voyaient avant tout une figure « du Nouveau ; Blake lisait celui-ci dans le même esprit ; pour lui, l'Evangile historique est une figure de « l'Évangile éternel ». Jésus signifie par avance tout homme spirituel, et son sacrifice sur le Calvaire est l'image du sacrifice que nous devons faire, à l'Esprit, du monde de la sensation régi par la liaison. C'est dans ce sens qu'il faut entendre les expressions chré- tiennes de l'.lakc, (|ni, souvent, pourraient prêter à l'équivoque ; aucun doute n'est permis dès qu'on a jeté les yeux sur la pièce blasphématoire intitulée l'ÉvangUe éternel; et d'ailleurs n'a-t-il pas dit un jour, en propres termes, à un ami : « Jésus est le seul Dieu ; vous l'êtes également et je lesuis»' V Dans une pareille philosophie, le n'ih' dépaiti à l'artiste est le plus noble de tous. A lui ([ui, plus que tout autre, vit par l'imagination, qui sème le rêve et le fait germer dans les âmes, à lui revient l'honneur de con- duire les hommes dans les voies de l'afl'ranchissement et du salut. Qu'il soit nmsieien, poète, sculpteur ou peintre, l'artiste inspiré est un prophète. lA suivre.) P.A.UL ALFASSA1024px-John_Varley_by_William_Mulready

William Blake et son ami John Varley

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Dessin d’une puce, dans Micrographia

    L’historien de l’art Hope Wernesse a suggéré que Blake aurait pu s’inspirer pour la réalisation de son tableau d’une représentation de puce effectuée en 1665 par Robert Hooke, un homme de science du XVIIe siècle à partir d’une vision de l’insecte effectuée par microscope.

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Utagawa Kuniyoshi - Le Poète Dainagon voit une apparition, 1860

Utagawa Kuniyoshi – Le poète Dainagon voit une apparition, vers 1840-42

     Le peintre japonais Utagawa Kuniyoshi (1797-1862) appartenait à la génération précédant celle de William Blake (1757-1827). Dans cette estampe, il représente l’histoire du poète, homme d’état, musicien et calligraphe japonais Dainagon Tsunenobu (2016-1097) qui déclarait avoir reçu une visite nocturne, celle d’un fantôme hirsute qui hurlait par sa fenêtre ouverte un poème du poète chinois connu au Japon sous de nom de Hakuraten. Cette estampe fait partie d’une série de 100 illustrations du Ogura Hyakunin Isshu (Cent poèmes de cent poètes différents) qui avait été rassemblés en 1235 par le célèbre poète Fujiwara Teikja (1162-1241).

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Le livre qui sauve…

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Die_Traumdeutung

Sigmund Freud (1856-1939)   À la fin de 1899, Sigmund Freud publie un ouvrage qui fera date dans l’histoire du mouvement psychanalytique puisqu’il en marquera la naissance, Die traumdeutung (L’Interprétation du rêve). Il s’agit d’un ouvrage autobiographique dans lequel il interprète ses propres rêves et élabore ce qui sera la psychanalyse. Freud déclarera plus tard que ce livre avait « surprit le monde lorsqu’il fut publié » et qu’il contenait selon son jugement du moment « la plus précieuse de toutes les découvertes que j’ai eu la bonne fortune de faire ».

SZONDI

     Dix sept années plus tard, en 1916, un jeune étudiant en médecine de Budapest dénommé Leopold Szondi se retrouve sur la ligne de front. Il porte dans son sac d’ordonnance le gros pavé de 375 pages écrit par Freud dix sept années plus tôt, Die traumdeutung. Lors d’un tir de shrapnel, un projectile traverse son sac et vient se ficher dans le livre. L’ouvrage de Freud vient de sauver la vie au jeune étudiant. Le jeune homme sera décoré, reprendra ses études à l’issu de la guerre et deviendra un psychopathologue célèbre spécialiste des pulsions.

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Types d’obus shrapnel et assemblages douille-obus existant en 1915.

Schrapnel

    Le shrapnel est le nom désignant l’« obus à balles » largement utilisé lors de la Première Guerre mondiale qui avait été inventé par Henry Shrapnel, un officier de l’armée britannique des XVIIIe et XIXe siècles. Alors qu’il était lieutenant dans l’artillerie royale britannique, il perfectionna en 1784 une munition qu’il nomma « boîte (à mitraille) sphérique » et qui était constituée d’une boule creuse en fonte remplie d’un mélange de billes et de poudre complété par une fusée-détonateur rudimentaire qui explosait en l’air, projetant des éclats sur les soldats ennemis. L’armée britannique l’adopta en 1803 et l’utilisa contre Napoléon de 1808 jusqu’à la bataille de Waterloo.
     L’obus à balle fut utilisé à grande échelle par tous les belligérants durant la Première Guerre mondiale.

45-Otto DIX, La grande Guerre, 04

Otto Dix – La Grande Guerre

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meraviglia

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Femme Berbère

femme Berbère

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