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Brigitte Bardot – carte postale allemande des édit. Krüger (1958-59 ?) – photo Sam Levin (1904-1992)
Ce portrait de Brigitte Bardot réalisé par le photographe d’origine ukrainienne Sam Levin que l’on peut supposer avoir été pris entre 1958 et 1960, années au cours desquelles Brigitte arborait des coiffures avec chignons-choucroutes, et que l’on qualifiera de kitsch est aujourd’hui activement recherché par les collectionneurs. Outre les couleurs artificielles, contrastées et peu nuancées qui étaient celles de l’époque, on est surpris par la raideur du maintien de l’actrice et le côté artificiel de la composition. La coiffure a été savamment organisée et figée et les yeux de l’actrice au lieu de se porter sur la rose qu’elle tient face à elle, se portent inexplicablement vers un point éloigné, sans doute le point que le photographe lui a demandé de fixer. La nudité de l’actrice est seulement évoquée et tout érotisme est évacué par la présence de la rose qui focalise avec le visage de B.B. le regard du spectateur. Ce regard qui effectue un va-et-vient entre les deux éléments marquants de la composition, la rose et le visage de l’actrice oublie de s’attarder sur sa nudité. Tout sonne faux dans ce portrait. Q’est-ce qui alors nous fait aujourd’hui éprouver du plaisir à la contemplation de cette photographie ? Est-ce du au fait qu’en la regardant nous éprouvons la nostalgie de nos jeunes années ? Que nous nous moquons de l’aspect un tantinet ridicule de la composition et des couleurs ? Est-ce lié à la valorisation de la photographie du fait de son caractère de rareté ? Il n’y a aucune raison d’apprécier cette photographie maladroite et de mauvais goût et pourtant nous l’apprécions. C’est sans doute dans ce paradoxe que réside la définition du kitsch…
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Quelques années seulement se sont écoulées entre les prises de vue de ces deux photographies de Brigitte Bardot mais au cours de ces quelques années la jeune fille timide et maladroite est devenue une femme et plus que le faible lap de temps qui sépare les deux prises de vue, c’est la différence d’âge entre les deux photographes qui importe. L’américain Bert Stern est de la génération qui suit celle de Sam Levin, il est le photographe des stars de Hollywood, de Marylin Monroe en particulier. Dans cette photo en noir et blanc, il nous montre au naturel une jeune femme libre, épanouie, sûre d’elle-même et bien dans sa peau. A la différence de la Brigitte de la photo précédente dont les cheveux savamment ordonnés s’élevaient de manière grotesque au-dessus de la tête, dont la bouche s’entrouvrait béatement et dont les yeux semblaient se perdre inutilement dans le lointain, les cheveux ébouriffés de la nouvelle Brigitte volent au vent en désordre, sa bouche est sensuelle et les yeux vous fixent de manière effrontée. Un sourire complice, presque effronté, éclaire son visage. C’est l’image d’une sauvageonne que nous renvoie le portrait réalisé par Bert Stern, une sauvageonne qui n’en a que faire des préjugés et des et des convenances et qui n’en fait qu’à sa tête. Pas besoin de montrer quelques centimètres carrés de peau nue pour susciter l’érotisme. Sept années avant mai 1968, c’est l’attitude toute entière de Brigitte, la conquête et la pratique de la liberté qu’elle signifie, qui est érotique…
Enki
Brigitte Bardot – portrait, 1961 – photo Bert Stern (1929-2013)
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