La magie du verbe – Amour, amour… Quand tu nous tiens, on peut bien dire : Adieu prudence…


La magie du verbe : éblouissement, hallucination, sidération, admiration…

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Fabrice Lucchini en transe, « Fou de Dieu littéraire » chez Bernard Pivot
ci-dessous vidéo INA, visible sur YouTube, c’est aussi ICI 

    Le 3 avril 1998, Fabrice Luchini était invité à la télévision par Bernard Pivot et d’autres invités tels  Jacqueline de Romilly et Éric Orsenna et fait son show habituel mais nous parle aussi avec passion et sincérité et de manière éblouissante de poésie à partir de son interprétation des poèmes Cabaret Vert et Vagabonds d’Arthur Rimbaud et de la fable Le Lion amoureux de La Fontaine. Magie du verbe, éblouissement, hallucination, sidération, admiration et en même temps inquiétude sur le pouvoir de persuasion que peut exercer le verbe sur nos consciences et nos âmes lorsqu’il se déploie avec une technique si aboutie et un talent si extrême qu’il en devient magique

  « Amour, amour…  Quand tu nous tiens, on peut bien dire : Adieu prudence… »


Les dangers d’une taille de guêpe : un conte chatnoiresque d’Alphonse Allais


Et l’on s’étonnera après cela d’avoir perdu la guerre de 1870 contre la Prusse…

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l’actrice et chanteuse Émilie Marie Bouchaud dit Polaire vers 1900

°°°

Pour en avoir le cœur net (conte chatnoiresque)

          Ils s’en allaient tous les deux, remontant l’avenue de l’Opéra.
     Lui, un gommeux* quelconque, aux souliers plats, relevés et pointus, aux vêtements étriqués, comme s’il avait dû sangloter pour les obtenir; en un mot, un de nos joyeux rétrécis.
      Elle, beaucoup mieux, toute petite, mignonne comme tout, avec des frisons fous plein le front, mais surtout une taille…

       — Invraisemblable, la taille !

     Elle aurait certainement pu, la petite blonde, sans se gêner beaucoup, employer comme ceinture son porte-bonheur d’or massif.
       Et ils remontaient l’avenue de l’Opéra, lui de son pas bête et plat de gommeux idiot, elle, trottinant allègrement, portant haut sa petite tête effrontée.

          Derrière eux, un grand cuirassier qui n’en revenait pas.
     Complètement médusé par l’exiguïté phénoménale de cette taille de Parisienne, qu’il comparait, dans son esprit, aux robustesses de sa bonne amie, il murmurait, à part lui :

     — Ça doit être postiche.

      Réflexion ridicule, pour quiconque a fait tant soit peu de l’anatomie.
     On peut avoir, en effet, des fausses dents, des nattes artificielles, des hanches et des seins rajoutés, mais on conçoit qu’on ne peut avoir, d’aucune façon, une taille postiche.
     Mais ce cuirassier, qui n’était d’ailleurs que de 2e classe, était aussi peu au courant de l’anatomie que des artifices de toilette, et il continuait à murmurer, très ahuri :

     — Ça doit être postiche.

       Ils étaient arrivés aux boulevards.
`     Le couple prit à droite, et, bien que ce ne fût pas son chemin, le cuirassier les suivit.
      Décidément, non, ce n’était pas possible, cette taille n’était pas une vraie taille. Il avait beau, le grand cavalier, se remémorer les plus jolies demoiselles de son chef-lieu de canton, pas une seule ne lui rappelait, même de loin, l’étroitesse inouïe de cette jolie guêpe.
        Très troublé, le cuirassier résolut d’en avoir le cœur net et murmura :

       — Nous verrons bien si c’est du faux.

       Alors, se portant à deux pas à droite de la jeune femme, il dégaina.
      Le large bancal, horizontalement, fouetta l’air, et s’abattit tranchant net la dame, en deux morceaux qui roulèrent sur le trottoir.
       Tel un ver de terre tronçonné par la bêche du jardinier cruel.

       C’est le gommeux qui faisait une tête !

À se tordre : histoires chatnoiresques, Paul Ollendorff, 1891.

 * gommeuxÉtymologie incertaine, on suppose que « les gommeux » au XIXe siècle étaient des     élégants qui n’avaient d’autre occupation que de se gommer, de se pommader, de se parfumer

°°°

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Polaire – Dessin de 1902 de Ferdinand Bac (?) dans La Vie en Rose,
À croire que le dessinateur avait lu le conte d’Allais


Marylin, encore et toujours…


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Marylin Monroe photographiée par Richard C. Miller en 1946
« Belle comme une vierge en assomption »

     Vous voyez Marylin à l’horizontale étendue sur le dos à la surface de l’eau ? Pour ma part je la vois s’élever verticalement dans les airs au-dessus de nos têtes en direction du ciel telle une vierge ascensionnelle des tableaux de Reni, Poussin, Prudhon ou Le Brun… Il ne lui manque qu’une cohorte d’anges, d’angelots et de cupidons se pressant autour d’elle pour l’accompagner et la célébrer. Comparer Marylin à la vierge en Assomption vous semble iconoclaste, voire même blasphématoire ? Tant pis…  

                      Enki

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Charles Le Brun – L’Assomption de la Vierge, XVIIe siècle

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      En mars et avril 1946, Marylin qui n’est encore que Norma Jean Dougherty pose en maillot de bain rayé rouge et blanc sur la plage et dans une piscine de l’hôtel Sheraton sur Wilshire Boulevard à Los Angeles, sous l’objectif du photographe Richard C. Miller. Elle a vingt ans et les photos seront publiées dans le magazine True Romance. Le photographe écrira à son sujet : « Elle était mignonne et avait fait déjà fait la couverture de plusieurs publications (…) sur la plage, une foule qui comprenait beaucoup d’hommes s’est rassemblée pendant la prise de vues (…)  Elle était très belle, très douce. Elle est venue dîner à la maison. C’était une fille agréable, conviviale puis elle est allé travailler pour les studios et est devenue Marylin Monroe. »

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Le Grand Nord à deux pas de chez moi


Samedi 25 février 2017 vers midi

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       Ce paysage de toundra, de prairie humide aux chaumes séchées au sortir de l’hiver où on ne perçoit aucune habitation et aucune présence humaine, il pourrait se trouver en Ecosse, dans le grand Nord d’un pays scandinave ou en lointaine Russie et pourtant il se trouve au bord du lac d’Annecy à un quart d’heure en voiture du centre de la ville d’Annecy. C’est une zone humide protégée; la nuit, les animaux sauvages descendus des pentes boisées de la montagne voisine : sangliers, cerfs et biches, viennent folâtrer sur les rives du lac.

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Heureuse, ma chienne Gracie s’en bronze le ventre…


Musique : le maître des sortilèges


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     Shigeru Umebayashi (梅林茂) est un compositeur japonais. Il fut l’un des leaders du groupe de rock new Wave japonais EX et commença à composer en 1985 après la séparation du groupe. Il est le compositeur de bandes originales de plus de 40 films japonais ou chinois parmi lesquels figurent deux célèbres morceaux présentés sur cette page  : le célèbre Yumeji’s Theme du film In the Mood for Love (2000) du réalisateur hongkongais Wong Kar-Wai et Polonaise tiré du film 2046 produit en 2004 par le même réalisateur.

     Dans les deux vidéos présentées ci-après on est saisi par l’alchimie subtile qui lie le lent déplacement des corps des acteurs à la beauté renversante à la musique ensorcelante  par ses rythmes lancinants qui accompagne leurs évolutions. Dans le clair-obscur de la nuit, les corps se croisent, se frôlent et s’éloignent donnant l’impression de ne jamais pouvoir se rencontrer, les regards s’évitent puis se confrontent pour finalement abandonner le combat et s’enfuir. La musique a sur nous les effets d’une onde puissante et douce dans laquelle nous nous sentons immergés et brassés comme dans les eaux d’un fleuve calme et puissant, symbole du temps, qui charrierait les images du passé, les images rêvées et aussi celles des occasions manquées. Une plongée dans un monde onirique comme celui d’une fumerie d’opium dont on ne pourrait se délivrer tant que durerait la musique. Un romantisme sombre et désespéré, une mélancolie poignante et en même temps un délice, un régal des yeux et des oreilles, le plaisir intense et rare et un brin masochiste causé par la captation et la soumission des sens…

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      L’ensorcelant Yumeji’s Theme du film  In the Mood for Love avec comme acteur Tony Leung Chiu-wai qui joue le rôle d’un journaliste qui entretient un relation amoureuse avec  sa voisine de palier, rôle pour lequel il reçut le prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes. C’est l’actrice Maggie Cheung, alors égérie du réalisateur, qui joue le rôle de la voisine la troublante Madame Chan.


     Ce lancinant morceau intitulé Polonaise est tiré du film 2046 avec le même acteur que dans  In the Mood for LoveTony Leung Chiu-wai qui joue cette fois le rôle de Chow, un écrivain de science-fiction en mal d’inspiration qui s’évade dans le livre qu’il tente de finir dans un lieu imaginaire, 2046, dont on ne revient jamais. Chow se souvient des femmes qui ont traversé son existence solitaire. 2046 est aussi le numéro de la chambre où il avait l’habitude de rencontrer Su Li-zhen, la seule femme qu’il ait sans doute aimée (interprétée par Maggie Cheung et Gong Li), en 1962 à Hong Kong. Quelques années plus tard, fin 1966, il s’installe dans la chambre 2047 et observe ce qui se passe à côté… Le réalisateur hongkongais Wong Kar-Wai était réputé pour ses hésitations au moment des tournages qui mettaient à rude épreuve les nerfs de ces acteurs. Au cours du tournage de 2046, l’actrice Maggie Cheung se brouillera de manière définitive avec son mentor qui en représailles coupera au montage la plupart des scènes où elle apparaîssait.


Cousin, cousine…


Mimétisme inter-espèces : connaissez-vous votre cousin Kanzi ?

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le bonobo Kanzi , Kanzi signifie « Trésor enfoui» en swahili

    « ce qui m’a surtout frappé chez Kanzi, c’est l’humanité qui transparaît sur son visage. Cet air de famille que l’on retrouve dans sa manière de jouer à cache-cache, de tenter de deviner mes intentions. »  (P. Jost)

      Vous ne connaissez pas Kanzi ? Vous devriez car il fait partie de votre famille étant l’un de vos proches cousins. Vous en doutez ? Vous ne reconnaissez chez lui aucun trait physique caractéristique de votre famille, dites-vous… C’est que vos ancêtres communs vivaient il y a un peu plus de quatre à cinq millions d’années et que depuis cette date les deux familles ont eu tout le loisir de se différencier. Kanzi est un bonobo, une espèce de singe de petite taille proche du chimpanzé qui vit au cœur de l’Afrique dans les forêts congolaises et la différence entre son génome et le nôtre n’est que de 1,6 %. Les bonobos ont en commun avec l’homme d’être bipèdes puisqu’ils utilisent la marche à pied dans 20 à 25 % de leurs déplacements (alors que les chimpanzés utilisent la bipèdie principalement en démonstration de dominance), certains d’entre eux ont une conscience aigüe de la propreté puisqu’ils éprouvent parfois le besoin de laver leur nourriture avant de la manger.

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Faites l’amour, pas la guerre !

   À l’instar des humains ils utilisent la sexualité dans un but qui ne se limite pas à la reproduction, par exemple pour le plaisir, pour réduire les tensions aux sein d’un groupe avant qu’elles ne dégénèrent, obtenir certains avantages comme la nourriture ou le statut social en bénéficiant du statut de leur partenaire. Comme les humains, ils peuvent «faire l’amour» face à face et s’embrasser en utilisant leur langue. Un gardien du zoo de San Diego en a fait l’expérience, pas encore initié aux mœurs de ce singe, il avait accepté un jour d’être embrassé par un bonobo. Il pensait que ce serait un baiser chaste mais faillit tomber à la renverse quand il sentit la langue du singe s’immiscer dans sa bouche… Précisons encore que l’utilisation de la sexualité à la résolution des conflits sociaux fait qu’ils sont «pansexuels» car ouvert aux deux sexes. Certains chercheurs (Franz de Waal) présentent les bonobos comme une espèce qui, à la manière des hippies des années soixante, « fait l’amour, pas la guerre » :

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« Les chimpanzés résolvent les questions sexuelles par le pouvoir, les bonobos les questions de pouvoir par le sexe. Chez les bonobos, les conflits ne prennent jamais d’ampleur : l’activité sexuelle se substitue à l’agressivité. Comme source de plaisir d’abord, mais aussi comme tactique subtile pour apaiser les tensions liées à la nourriture, obtenir une faveur, un épouillage. Un peu comme les couples qui font la paix sur l’oreiller après une dispute. (…) Les bonobos se comportent comme si le contact érotique était la chose la plus normale qui soit pour apaiser les corps et les esprits. Une activité parmi d’autres qui pimente brièvement, mais fréquemment, la vie sociale. En un rien de temps, ils passent de la nourriture au sexe, du sexe au jeu, de l’épouillage à un baiser, et ainsi de suite… »  (Franz de Waal).

      Enfin, des chercheurs ont remarqués qu’en captivité, la paix sociale était maintenue par l’existence d’un «bouc émissaire» (pharmakos) qui permettait la réduction des tensions au sein du groupe. En même temps, on a décelé chez les bonobos des pratiques de contact affectif qu’il soit sollicité par un bonobo en détresse ou offert spontanément par un membre du groupe appartenant généralement aux parents et aux amis ce qui laisserait supposer l’existence d’une pratique de consolation basée comme chez l’homme sur l’empathie (Consolation hypothesis)   Les bonobos utilisent dans certaines circonstances des armes et des outils : branches en cas d’attaque et baguettes pour extraire des insectes d’une termitière. À l’état sauvage, ils communiquent par de nombreuses mimiques faciales et par des vocalisations aiguës. Enfin ils sont capables de s’auto-médicaliser par ingestion de feuilles particulières.

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Kanzi communiquant avec la psychologue Sue Savage-Rumbaugh avec son clavier

       Mais revenons à Kanzi, ce bonobo vit à Des Moines, dans l’Iowa, en compagnie de chercheurs qui l’étudient avec d’autres singes de son espèce depuis plusieurs années. La psychologue Sue Savage-Rumbaugh a tenté dans un premier temps à communiquer avec Matata, la mère du jeune singe à l’aide d’un système de symboles géométriques mais sans succès mais c’est finalement Kanzi qui jouait à proximité qui peu à peu a assimilé les règles du langage par signes. C’est ainsi qu’il a dans un premier temps utilisé sur un clavier 6 symboles, puis 18 et enfin, à l’âge de 26 ans,  348 :

«Les symboles se réfèrent aux objets familiers (le yaourt, la clé, le ventre, la boule…), des activités favorites (la poursuite, les chatouilles…) et même quelques concepts considérés assez abstraits (le présent, ce qui est mal…). Le bonobo, nommé Kanzi, a appris à combiner ces symboles dans ce que les linguistes appellent une « proto-grammaire ». Une fois, lors d’une sortie dans une forêt-laboratoire où il a été élevé, Kanzi a touché les symboles pour « la guimauve » et « le feu ». Quand on lui a donné des allumettes et des guimauves, Kanzi a cassé des brindilles pour préparer un feu, les a allumées avec les allumettes et a grillé les guimauves sur un bâton.»

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abstraction de Kanzi  – C’est aussi beau que du Cy Twombly et on ne lui paye que 1.500 dollars…
(à gauche Kanzy   –   à droite Cy Twombly)

     Mais la capacité de Kanzi à communiquer avec l’homme va encore plus loin puisqu’il connait la signification de 3 000 mots anglais parlés (plus que j’en connais…). Quand Kanzi entend une personne prononcer dans une autre pièce certains mots, il indique alors le symbole approprié sur son clavier d’ordinateur qui transmet l’information à un synthétiseur vocal. Il comprendrait même les mots qui ne font pas partie du vocabulaire de son clavier ; c’est ainsi qu’il peut répondre convenablement aux commandes comme « mets le savon dans l’eau », « porte tel objet dehors » et « ouvrir orange » (mais seulement en anglais). Il s’inquiète aussi de l’heure du repas : « Donne-moi à manger », imagine des jeux : « Poursuivre moi ? », manifeste son affection : « Embrasse-moi ». Il invente aussi de nouveaux mots chargés de poésie : « eau-oiseau » pour décrire un cygne et « eau-écouter » pour désigner l’eau pétillante… Enfin, c’est un peintre accompli (non figuratif…) dont l’une des toiles s’est vendue, au bénéfice du refuge où il vit, 1.500 $….


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    Aujourd’hui Kanzi est capable de faire du feu, cuire un steak et faire fondre un marshmallow au bout d’un bâton. (voir les vidéos de Kanzi sur YouTube à ce sujet)

      « Sue Savage-Rumbaugh assure que cela montre la profonde intelligence du singe, notamment par l’effet d’un mimétisme. En effet, Kanzi a longtemps été fasciné par la manière dont les gardiens de son camp faisaient cuire les aliments, puis on l’a encouragé à interagir avec les humains et à les copier», ajoute-t-elle. Sur une vidéo, on peut le voir faire du feu, en ramassant du bois et des feuilles mortes, tout en tenant compte de la position du vent. Puis saisir une poêle, la mettre sur une grille et laisser le tout mijoter. Bien que les singes bonobos et les chimpanzés utilisent de grandes brindilles et des feuilles comme des outils, aucun n’avait jamais montré une telle habileté pour la cuisson des aliments. Aussi, quand Kanzi a terminé avec le feu, le Docteur Savage-Rumbaugh lui demande de l’éteindre à l’aide d’une bouteille d’eau. Le singe va ainsi verser délicatement le liquide sur le feu jusqu’à ce qu’il s’éteigne. Mais ce n’est pas tout. Par exemple, Kanzi prend une guimauve, la colle au bout d’une brindille et la maintient soigneusement sur les flammes, en s’assurant qu’il ne brûle pas. Sue Savage-Rumbaugh ajoute que cela ne résulte pas du hasard et que «Kanzi fait du feu parce qu’il le souhaite. Très jeune, il a regardé le film La guerre du Feu qui met en scène le premier homme qui lutte pour faire du feu. Il était fasciné par ce film, il l’a regardé des centaines de fois. Et Kanzi s’en est probablement inspiré.»


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Bonobos s’occupant d’un petit

Supériorité du bonobo sur l’homme

     Le journal Daily Mail s’inquiète des capacités imitatives de Kanzi qui préfigurent peut-être l’avenir menaçant pour l’homme mis en scène dans le film La Planète des Singes où ces derniers ont pris le pouvoir et dominent la race humaine : « Qu’arriverait-il s’il était libéré dans la nature, où les autres bonobos pourraient copier son comportement ? Est-ce que les bonobos sauvages pourraient apprendre à maîtriser le feu de façon indépendante tout comme nos propres ancêtres ? ».

    Mais pourquoi les singes voudraient-ils vivre à notre manière alors que leur mode de vie est largement supérieur au nôtre. Supérieur au nôtre ? Eh bien parce que les bonobos passent 50 % de leur temps au repos, à folâtrer, au plaisir du sexe ou à jouer. Les activités d’une journée de bonobo se répartissent ainsi : recherche de nourriture : 20 % du temps, manger : 20 %, déplacements (en moyenne 2 km par jour) : 10 %, repos : 40 % , autres (dont le jeu) 10 %. Que reste t’il a l’homme moderne drogué par le travail et les occupations inutiles comme temps vraiment libre durant lequel il peut s’épanouir ? Dan Everett, parti comme missionnaire en 1977 dans une tribu isolée de l’Amazonie, les Pirahãs, s’est aperçu que ceux-ci parlaient un langage unique dénué de système de numérotation, de couleurs et de références au temps passé et futur. Les Pirahãs ne vivaient que dans le temps présent, privilégiant l’expérience immédiate et jugeant totalement inutile de s’intéresser à ce qu’ils ne connaissaient pas et à se projeter dans le temps. Comme les bonobos, les Pirahãs chassent, pêchent, partagent la nourriture et le reste du temps s’amusent, palabrent et profitent de la vie sans avoir besoin de compter. À tous ceux qui les ont côtoyés, ils sont apparus comme les plus heureux des hommes qu’ils avaient rencontrés jusque là.

     Victime de la dégradation de son habitat naturel par l’homme qui pratique la déforestation et le braconnage, le bonobo comme les autres grands singes est sur la liste rouge des espèces menacées.

            Kansi :  « Trésor enfoui» en swahili, Trésor bientôt enfoui et disparu à jamais ?


Complainte du petit cheval blanc


Ce monde est vraiment injuste…

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Guernica de Picasso (détail)

La complainte du petit cheval blanc

Le petit cheval dans le mauvais temps,        Sa voiture allait poursuivant 
Qu’il avait donc du courage !                          Sa belle petite queue sauvage. 
C’était un petit cheval blanc,                           C’est alors qu’il était content
Tous derrière, tous derrière,                           Tous derrière, tous derrière,
C’était un petit cheval blanc,                           C’est alors qu’il était content,
Tous derrière et lui devant.                             Tous derrière et lui devant.

Il n’y avait jamais de beau temps                  Mais un jour, dans le mauvais temps, 
Dans ce pauvre paysage,                                 Un jour qu’il était si sage,
Il n’y avait jamais de printemps,                   Il est mort par un éclair blanc,
Ni derrière, ni derrière.                                  Tous derrière, tous derrière,
Il n’y avait jamais de printemps,                   Il est mort par un éclair blanc
Ni derrière, ni devant.                                     Tous derrière et lui devant.

Mais toujours il était content,                        Il est mort sans voir le beau temps,
Menant les gars du village,                             Qu’il avait donc du courage !
A travers la pluie noire des champs,            Il est mort sans voir le printemps
Tous derrière, tous derrière,                          Ni derrière, ni derrière.
A travers la pluie noire des champs,            Il est mort sans voir le beau temps,
Tous derrière et lui devant.                            Ni derrière, ni devant.

compositeur Georges Brassens sur un poème de Paul Fort, 1952

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      Brassens et Paul Fort. Ci-dessous, la chanson interprétée par Brassens qui m’a beaucoup attendri quand j’étais enfant. Je trouvai qu’il était d’une injustice insupportable que ce brave petit cheval innocent qui en plus faisait preuve de tant d’abnégation pour accomplir sa difficile tâche au bénéfice des humains soit frappé par la foudre. Dans ma naïveté d’enfant, je ne comprenais pas pourquoi le Bon Dieu commettait (ou laissait faire, ce qui revenait au même) cela. Peut-être cette révolte a t’elle joué un rôle dans le développement ultérieur de mon athéisme.


L’infini roulé blanc de ta nuque à tes reins


Un simple quatrain d’Arthur Rimbaud transmis par Verlaine

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    L’étoile a pleuré rose … (1871)

L’étoile a pleuré rose au cœur de tes oreilles,
L’infini roulé blanc de ta nuque à tes reins
La mer a perlé rousse à tes mammes vermeilles
Et l’Homme saigné noir à ton flanc souverain.

Arthur Rimbaud

Pour un commentaire très complet de ce poème, c’est ICI

J’aurais pu également utiliser comme légende de cette photo (dont je ne connais pas l’auteur) ces vers d’André Breton :

Ma femme au dos d’oiseau qui fuit vertical
Au dos de vif-argent
Au dos de lumière
À la nuque de pierre roulée et de craie mouillée
Et de chute d’un verre dans lequel on vient de boire
Ma femme aux hanches de nacelle
Aux hanches de lustre et de pennes de flèche
Et de tiges de plumes de paon blanc
De balance insensible
Ma femme aux fesses de grès et d’amarante
Ma femme aux fesses de dos de cygne
Ma femme aux fesses de printemps

André Breton, Clair de Terre (extrait), 1931


Et maintenant, cultivons un peu notre mélancolie…


« For the times they are a-changin’ »    interprété par Keb’ Mo’


Come gather around people

Wherever you roam
And admit that the waters
Around you have grown
And accept it that soon
You’ll be drenched to the bone
And if your breath to you is worth saving
Then you better start swimming or you’ll sink like a stone
For the times they are a-changing

Come writers and critics
And keep your eyes wide
The chance won’t come again
And don’t speak too soon
For the wheel’s still in spin
And there’s no telling who that it’s naming
For the loser now will be later to win
Cause the times they are a-changing

Come senators, congressmen
Please heed the call
Don’t stand in the doorway
Don’t block up the hall
For he that gets hurt
Will be he who has stalled
There’s the battle outside raging
It’ll soon shake your windows
And rattle your walls
For the times they are à-changing

Comme mothers and fathers
Throughout the land
And don’t criticize
What you can’t understand
Your sons and your daughters
Are beyond your command
Your old road is
rapidly aging
Please get out of the new one
If you can’t lend your hand
For the times they are a-changing

The line it is drawn
The curse it is cast
The slow one now
Will later be fast
As the present now
Will later be past
The order is
Rapidly fading
And the first one now
Will later be last
For the times they are a-changing

To roam : errer / To drench : tremper / to lend : prêter / curse : malediction / cast : jeter / fading : décolorer


Keb'Mo'.png   Keb’ Mo’, de son vrai nom Kevin Moore, est un chanteur et guitariste de blues américain, né à Los Angeles, Californie, en 1951. Il a remporté plusieurs Grammy Award du Meilleur disque de Blues contemporain. Après avoir commencé une carrière d’acteur de théâtre même s’il pratiquait la musique depuis son adolescence, essentiellement du calypso et du folk acoustique sous l’influence d’un de ses oncles folk singer. Il a été repéré par les commerciaux de chez Sony, qui lui ont proposé de jouer au nouveau Robert Johnson (crédit Wikipedia)


Mais peut-être préférez-vous la version originale par Bob Dylan de 1964