Il n’y a pas d’amour heureux
Nina Simone
Il n’y a pas d’amour heureux
Nina Simone
La joie de vivre en étendard
Connaissez vous Flavia Coelho ?
Une jeune femme incroyable et irrésistible. Même que j’croyais pas qu’ça pouvait exister une fille comme ça ! Une jeune femme belle, drôle, magnétique. De la dynamite sur pattes, de l’énergie à revendre et un sourire, un sourire… un sourire qui désarme, qui entraîne, qui enjôle, qui séduit et je ne parle pas de son délicieux accent brésilien. Flavia, je vous remercie d’exister, d’être la preuve vivante qu’un être humain, sur cette terre meurtrie, où s’installe le pessimisme et de désespoir, qu’un être humain peut être animé d’une joie de vivre démesurée, plus contagieuse encore que le virus couronné. Sainte Flavia, lorsque vous chantez et remuez, vous réveilleriez les morts, feriez marcher les paralytiques et recouvrir la vue aux aveugles. Vous devriez être canonisée et, brésilienne qui avez choisi de vivre en France, devriez recevoir la légion d’honneur, devenir modèle de nos Mariannes dans nos mairies et avoir votre effigie au musée Grévin. De plus, vous détestez Bolsonaro et militez pour les droits des indigènes d’Amazonie. Alors…
Voici trois de ses chansons que j’ai découvert sur le Net : » La bonne nouvelle« , un live né du confinement, « Cé inventa » et « temontou« . Avec cette dernière chanson, elle m’a complètement désorienté et je ne sais plus quelle est ma droite de ma gauche ni le haut de mon bas… Il y en a des dizaines d’autres, toutes aussi entraînantes les unes que les autres. Vous aurez compris, je suis séduit !
Parce que t’es mon haut
Parce que t’es mon bas
Parce que t’es ma gauche, ma droite, mon ciel et mon trépas
Parce que c’est pour toi que j’imagine
Tous mes foutus stratagèmes
Et que t’es la seule raison d’être de ce maudit théorème
Parce que tu es tout ce que je voudrais être
Tout ce que je ne suis pas
Parce que tu es tout c’que j’aime, tout c’que j’aime (tout
c’que j’aime)
Parce que t’es mon haut
Parce que t’es mon bas
Parce que sans dessus, dessous j’sais plus quand on …,
c’est tout
Parce que t’es mon seul problème
Et mon seul remède ici-bas
Parce que t’es le poison et la cûre
C’est la seule chose dont je sois sûre
Tu es tout c’que j’aime, tout c’que j’aime
Tout c’que j’aime (Tout c’que j’aime)
Parce que t’es mon haut
Parce que t’es mon bas
Parce que t’es ma gauche, ma droite
Je sais plus où je suis quand t’es plus là
Parce que tu sais tout ce que je veux
Et aussi tout c’que j’ne veux pas
Parce que tu es tout c’que j’aime
Et tout cqu’il me restera
Parce que tu es tout ces petits riens
Qui font mon tout et c’est pas rien
Tu es tout c’que j’aime, tout c’que j’aime (Tout c’que
j’aime)
Et même si l’on s’échine
et qu’on se hante souvent
moi je sais que l’air que je respire
est plus doux quand t’es dedans
Tu es tout c’que j’aime
Tout c’que j’aime
Parce que t’es mon haut
Parce que t’es mon bas
Parce que t’es ma gauche, ma droite, mon ciel et mon trépas
Parce que tu sais tout ce que je veux
Et aussi tout c’que je n’veux pas
Parce que la seule chose qui me hante
C’est la distance jusqu’à tes bras
Tu es tout c’que j’aime, tout c’que j’aime
Tu es tout c’que j’aime, tout c’que j’aime
Oooh Aaah
Oooh Aaah
Tout c’que j’aime
Parce que tu es tout c’que j’aime, tout c’que j’aime
°°°
Et une dernière pour la route, « DNA«
Sortir du néolithique…
Conférence du philosophe Alain Badiou à l’institut Français de Grèce le 12 décembre 2019 : la Liberté, l’Egalité, la démocratie, le parlementarisme, la Nature, la technique, le néolithique, le capitalisme, l’impossible et le possible (entre autres)
Un texte fascinant de simplicité, de justesse et de clarté. Merci, Monsieur Badiou. (Nous avons supprimé les 9 mn 05 de la fastidieuse introduction)
Sur la Nature
Depuis les origines de la philosophie on se demande ce qui recouvre le mot Nature. Il a pu signifier la rêverie romantique des soirs couchants, le matérialisme atomique de Lucrèce De Natura rerum (La Nature des Choses), l’Être intime des choses, la totalité de Spinoza « Deus sive Natura » (Dieu ou la Nature), l’envers objectif de toute culture, le site rural et paysan par opposition aux artifices suspects de la ville, « la terre elle ne ment pas » disait Pétain qui n’est pas une référence convenable. Ça peut désigner aussi la biologie par différence de la physique, la cosmologie au regard du petit monde qu’est notre planète, l’invariance séculaire au regard de la frénésie inventive, la sexualité naturelle au regard de la perversion, etc. Ce que je crois, c’est qu’aujourd’hui Nature désigne en fait surtout la paix des jardins et des villas, le charme touristique des animaux sauvages, la plage et la montagne où passer un agréable été et qui donc peut imaginer que l’homme soit comptable de la Nature lui qui n’est à ce jour qu’une puce pensante sur une planète secondaire dans un système solaire moyen sur les bords d’une galaxie banale.
Le capitalisme, c’est la forme contemporaine du néolithique*
L’humanité depuis quatre ou cinq millénaires est organisée de façon immuable par la triade de la propriété privée qui concentre d’énormes richesses dans les mains de très petites oligarchies, de la famille où les fortunes transitent via l’héritage, de l’Etat qui protège par la force armée la propriété et la famille. C’est cette triade qui définit l’âge néolithique de notre espèce. Et nous y sommes toujours, voir plus que jamais. Le capitalisme c’est la forme contemporaine du néolithique et son asservissement des techniques par la concurrence, le profit et la concentration du capital ne fait que porter à leur comble les inégalités monstrueuses, les absurdités sociales, les massacres guerriers et les idéologies délétère qui accompagne depuis toujours sous le règle historique de la hiérarchie de des classes le déploiement des techniques. Les techniques ont été les conditions initiales et non pas du tout le résultat final de la mise en place néolithique.
Sur la nature humaine : De l’audace camarades, tentons l’impossible…*
On ne peut pas parler de nature humaine mais d’un rapport intra-humain entre individu et sujet :
Ça, c’est la clé de l’humanité comme telle. L’humanité comme telle, ce n’est pas ce dont la nature humaine est capable, c’est le surgissement dans la nature humaine de ce dont elle se se savait pas capable et cette capacité à faire qui s’appelle la création, la capacité créatrice de l’humanité et je crois qu’on pourrait définir la politique la meilleure comme celle dont le point d’appui principal n’est pas la nature humaine mais le sujet humain qui s’appuie à tout moment sur l’hypothèse légitimement acceptée que le sujet humain est capable de ce qu’il ne se sait pas lui même capable. Cela veut dire qu’au delà la nature humaine il y a la dialectique entre ce qui est possible et ce qui est impossible. Je crois que le statut particulier de l’animal humain c’est de déplacer constamment les frontières entre le possible et l’impossible et de ne pas être déterminé pas même par l’impossibilité;
Il faut tenir ferme sur un concept de l’humanité qui serait le déplacement constant et créateur de la frontière apparemment établie entre ce qui est possible et ce qui est impossible. L’homme c’est l’animal de l’impossible et finalement quand on me dit que le communisme est impossible, cela ne m’impressionne pas beaucoup car finalement parce que tout ce qui est intéressant est impossible.
La réaction, c’est toujours la défense stricte de l’impossibilité ; le conservatisme c’est le gardien de l’impossible qui vise interdire le développement d’une nouvelle forme du sujet que créé par le déplacement entre le possible et l’impossible.
* les titres sont de moi, le texte a été légèrement remanié.
articles liés
Lac d’Annecy, Samedi 23 mai à 20h 53
Hubert-Felix Thiefaine, encore et toujours…
Annihilation
Qu’en est-il de ces heures troubles et désabusées
Où les dieux impuissants fixent l’humanité ?
Où les diet nazi(e)s s’installent au Pentagone
Où Marilyn revêt son treillis d’Antigone ?
On n’en finit jamais d’écrire la même chanson
Avec les mêmes discours les mêmes connotations
On n’en finit jamais de rejouer Guignol
Chez les Torquemada chez les Savonarole
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Lassé de grimacer sur l’écran des vigiles
Je revisite l’Enfer de Dante et de Virgile
Je chante des cantiques mécaniques et barbares
A des poupées Barbie barbouillées de brouillard
C’est l’heure où les esprits dansent le pogo nuptial
L’heure où les vieux kapos changent ma pile corticale
C’est l’heure où les morts pleurent sous leur dalle de granit
Lorsque leur double astral percute un satellite
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Crucifixion avec la Vierge et dix-sept saints
Fra Angelico met des larmes dans mon vin
La piété phagocyte mes prières et mes gammes
Quand les tarots s’éclairent sur la treizième lame
On meurt tous de stupeur et de bonheur tragique
Au coeur de nos centrales de rêves analgésiques
On joue les trapézistes de l’antimatière
Cherchant des étoiles noires au fond de nos déserts
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Je dérègle mes sens et j’affûte ma schizo
Vous est un autre je et j’aime jouer mélo
Anéantissement tranquille et délicieux
Dans un décor d’absinthe aux tableaux véroleux
Memento remember je tremble et me souviens
Des moments familiers des labos clandestins
Où le vieil alchimiste me répétait tout bas:
Si tu veux pas noircir, tu ne blanchiras pas
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Je calcule mes efforts et mesure la distance
Qui me reste à blêmir avant ma transhumance
Je fais des inventaires dans mon Pandémonium
Cerveau sous cellophane coeur dans l’aluminium
J’écoute la nuit danser derrière les persiennes
Les grillons résonner dans ma mémoire indienne
J’attends le zippo du diable pour cramer
La toile d’araignée où mon âme est piégée
J’attends le zippo du diable pour cramer
La toile d’araignée où mon âme est piégée
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Qui donc ?
***
***
J’arrive !
La dérive des confinements. Un peu de psycho…
Après un mois de confinement, la presse se fait l’écho des dérives psychiques induites par cette situation. Le confinement « n’a pas les mêmes conséquences pour tous, selon les facteurs de protection psychique qui ont pu être acquis ou qui, hélas, font défaut », explique le neuropsychiatre Boris Cyrulnik dans un entretien à « L’Obs » publié cette semaine. Il cite « ceux qui souffrent de fragilités psychiques antérieures, un trauma infantile, une enfance difficile, des conflits familiaux ou une précarité sociale ». Dans un autre article la psychologue-psychothérapeute Catherine Pierrat écrit : « Chacun va réagir différemment selon son histoire. Pour certains, cela va réveiller des blessures familiales ou des moments douloureux vécus dans l’enfance. Le confinement va alors se transformer en véritable torture psychologique« . Le cas clinique présenté ci-dessus est typique de la réminiscence, sous l’action du confinement, de traumas anciens d’oppression et de négation du moi vécus par les deux sœurs au cours de leur enfance suite à une éducation pesante et rigide menée par un père autoritaire et omniprésent qui les avait empêché de s’épanouir et de devenir des adultes à part entière. Ce n’est pas un hasard si elles se déclarent être « bloquées » dans un « siphon » intergalactique. Rappelons, qu’en plomberie, un siphon est un élément constitué par courbure d’une canalisation d’eaux dites « usées » (dénomination qui révèle une volonté inconsciente d’évitement des qualificatifs « sale » ou « pollué » faisant référence trop explicite à leur impureté). la fonction d’un siphon est de « bloquer » les déchets et résidus de taille importante entraînées par les effluents liquides risquant d’obstruer la canalisation. En même temps, cet accessoire permet de bloquer le retour des mauvaises odeurs. La fonction du siphon est donc de retenir la partie du « sale » qui est hors norme de par sa nature et ses dimensions et qui nécessite pour être évacuée l’intervention d’un spécialiste nettoyeur, le plombier (ou d’un bon bricoleur). On n’ose imaginer ce que doivent être les terribles souvenirs d’enfance de ces jeunes personnes, enfouis au plus profond de leur tuyauterie psychique, trop volumineux pour être évacués naturellement par l’usure du temps et le phénomène de l’oubli et qui stagnent dans le siphon de leur inconscient attendant la moindre occasion pour résurger et faire rouvrir les vieilles blessures. L’appel désespéré lancé au Père destructeur montre le degré élevé de l’aliénation et la régression infantile qui en résultent… Je leur conseille, pour retrouver leur sérénité, l’intervention d’un(e) psychanalyste-plombier(e) (dans ce cas qui nous intéresse political correctness s’impose) qui se fixera pour tâche de purger ce siphon psychique encombré afin de rétablir l’écoulement harmonique de leurs fluides mentaux.
Enki-Doc
Orion’s Horsehead Nebula
Pour prendre leur mal en patience… Voici quarante minutes d’éternité selon Gérard Manset,
« La mort d’Orion »
Où l’horizon prend fin,
Où l’œil de l’homme jamais n’apaisera sa fin,
Au seuil enfin de l’univers,
Sur cet autre revers,
Trouant le ciel de nuit
D’encre et d’ennui
Profond,
Se font et se défont les astres.
Par delà les grands univers
Où les colonies de la terre
Prolifèrent
Et dans la grande nébuleuse noire
Dont, voici dix mille ans, fut l’histoire.
Depuis qu’ils cheminaient par dix et cent de milles
Pour délaisser la terre et ses anciennes villes,
Depuis qu’ils voulaient voir
Ce peuple fou, ailé, la nébuleuse noire,
Depuis donc et déjà tant de siècles passés
Qu’ils avaient délaissé
La terre,
Ce peuple solitaire
S’éprit de ses vestiges
Et voulu en revoir la tige.
Or, pendant que coulaient
Tous ces millions d’années
Sur la planète mère,
Les survivants damnés
Redoraient le parvis
De leur vie,
Cependant que croulait interminablement
Un bruit de poussière et de vent
Et que s’affaissait le béton
Que coulait le peuple d’Orion.
On a vu bien d’autres étoiles depuis,
Allumées comme au fond d’un puits.
Sur Orion que la mort attend,
Un prêtre fait asseoir les hommes à genoux
Et le peuple incompris
Prie.
Orion ne reverra plus jamais le pays
Et la lune, sa sœur, aura bien loin d’ici
Des ailes.
Les cieux comme un taudis,
Privés de leur dentelles
Baissent les yeux
Au milieu des cerisiers blancs,
Sur son cheval,
Le prêtre a des ciseaux d’argent.
Il a les mains couvertes de papier doré
Et le devant de son visage est décollé.
Les grands arbres se dressent, les yeux mouillés
Et leurs cheveux comme des tresses
Qui cachent le soleil,
Les fleurs sont comme des oreilles, décollées.
Nous,
Même si nos membranes fragiles
Nous rendent un peu moins agiles
Ensemble,
S’il faut venger nos morts,
S’il faut souffrir encore,
Nous incinèrerons leurs corps
Si on veut de nous encore, encore,
Si on veut de nous encore, encore.
Et l’autel est dressé
Sur ses deux mains, sur ses bras blessés,
Regardant vers le nord,
Les mains tendues comme une plante carnivore.
Et du plus loin que l’on entende les rires
Déjà morts au sortir de leur bouche de cire,
Il faut les laisser faire.
Ce ne sont que des mammifères
Dans ce monde de prose
Où rien ne tient quand on le pose.
Nous,
Même si nos yeux sont trop clairs,
Nous retournerons sur la terre
Ensemble.
Nous franchirons les mers
De notre planisphère,
Reprendrons nos mines de fer
Si on nous laisse faire,
Si on nous laisse faire.
Nous,
Même si nos membranes fragiles
Nous rendent un peu moins agiles
Ensemble,
S’il faut venger nos morts,
S’il faut souffrir encore,
Nous incinèrerons leurs corps
Si on veut de nous encore,
Si on veut de nous encore.
Orion,
Sentant sa fin venir,
Dressa ses habitants contre leurs souvenirs,
Contre leurs souvenirs.
Depuis longtemps,
Depuis longtemps
Riche de tout,
Ce peuple parasite
Auquel nous rendions visite
Souvent fit notre faillite.
D’où il les avait mis sur le sol d’Orion,
Il pointa ses canons la tête la première
Vers l’horizon puis vers la terre.
Par delà les plus hauts monts,
Au milieu des goémons,
Vit Salomon,
Pareil aux preux chevaliers teutoniques,
Comme les lépreux sataniques,
Et dont la descendance princière et millénaire,
Pour toujours, un jour quitta la terre.
C’est au creux d’une lagune
Dont il cheminait les dunes
Qu’un soir de lune,
Descendant du ciel en spirales,
Tombèrent les anges des étoiles.
Tenant à peine debout,
Ensevelis par la boue,
Le sable mou,
Leur semblant comme autant de serpents,
Ils détruisirent tout en un instant.
Depuis longtemps,
Depuis longtemps
Riche de tout
Comme un coquillage
Dont la coquille est sans âge,
Salomon ignorait d’autres rivages.
Par delà les plus hauts monts,
Au milieu des goémons,
Vivait Salomon,
Pareil aux preux chevaliers teutoniques
Comme les lépreux sataniques,
Et dont le descendance princière et millénaire
Pour couvrir son corps creusa la terre.
Les fossoyeuses marines
Trouveront dans sa poitrine
Tant de vermines
Qui malgré les prêtres d’Orion,
Se nourrissant de lui, revivront.
Depuis longtemps,
Depuis longtemps
Jaloux de tout,
Debout dans leurs caravelles,
Ce peuple aux formes nouvelles
Fit tomber nos citadelles
D’un coup d’aile.
Orion ne reverra plus jamais le pays
Et la lune, sa sœur, aura, bien loin d’ici,
Des ailes.
Orion n’aura jamais s’il faut, pleuré, grandi,
Quoiqu’aura bien vécu du moins à ce qu’on dit
Sans elle.
Les cieux comme un taudis
Privés de leurs dentelles
Baissent les yeux.
Nous,
Par le droit que nous donne notre âge
Réduisons nos fils à l’esclavage,
Ensemble.
Si demain chacun d’eux nous ressemble,
Gérard Manset – La Mort d’Orion
0:00 Introduction
4:26 La mort d’Orion
12:38 Où l’horizon prend fin
14:25 Salomon l’hermite
20:22 Final
22:11 Vivent les hommes
29:38 Enchaînement
30:37 Ils
34:16 Le Paradis terrestre
40:00 Élégie funèbre
Pour manifester ma peine aux souffrances que supporte avec courage et dignité actuellement le peuple italien je lui dédie cette bouleversante interprétation de 1956 par l’inoubliable Maria Callas du morceau « Vissi D’arte » (« J’ai vécu d’Art ») tiré de la Tosca de Pucini.
Paroles de chanson italienne « Vissi d’Arte«
Vissi d’arte, Vissi d’amore, J’ai vécu d’art, j’ai vécu d’amour,
non feci mai mâle ad anima viva! Je n’ai jamais fait de mal à âme qui vive !
Con man furtiva Par une main cachée
quante misere conobbi aiutai. J’ai soulagé toutes les misères que j’ai rencontrées.
Sempre con fè sincera Toujours avec une foi sincère
la mia preghiera Ma prière
ai santi tabernacoli Sali. Est allée vers le saint tabernacle.
Sempre con fè sincera Toujours avec une foi sincère
diedi fiori agl’altar. J’ai offert des fleurs à l’autel.
Nell ‘ ora del dolore En ce temps de douleur
perchè, perchè, Signore, Pourquoi, pourquoi, Seigneur,
perchè me ne rimuneri così? Pourquoi m’en récompenses-tu ainsi ?
diedi gioielli della Madonna al manto, J’ai offert des joyaux pour le manteau de la Madone
e diedi il canto agli astri, al ciel, Et offert mon chant aux étoiles, au ciel,
che ne ridean più belli. Qui en resplendissaient, encore plus beaux.
Nell’ora del dolor En ce temps de douleur
perchè, perchè, Signor, Pourquoi, pourquoi, Seigneur,
ah , perchè me ne rimuneri così? Ah, pourquoi m’en récompenses-tu ainsi ?
***
A l’heure des fanatismes de tous bords qui prônent la pureté ethnique, la pureté religieuse, les revendications identitaires et communautaristes qui excluent l’autre allant jusqu’à éradiquer et génocider leurs semblables, un texte fort et clairvoyant de l’écrivain Michel Tournier tiré de son roman Le Roi des aulnes pour lequel il a obtenu en 1970 le Prix Goncourt.
°°°
« L’une des inversions malignes les plus classiques et les plus meurtrières a donné naissance à l’idée de pureté. La pureté est l’inversion maligne de l’innocence. L’innocence est amour de l’être, acceptation souriante des nourritures célestes et terrestres, ignorance de l’alternative infernale pureté-impureté. De cette sainteté spontanée et comme native, Satan a fait une singerie qui lui ressemble et qui est tout l’inverse : la pureté. La pureté est horreur de la vie, haine de l’homme, passion morbide du néant. Un corps chimiquement pur a subi un traitement barbare pour parvenir à cet état absolument contre nature. L’homme chevauché par le démon de la pureté sème la ruine et la mort autour de lui. Purification religieuse, épuration politique, sauvegarde de la pureté de la race, nombreuses sont les variations sur ce thème atroce, mais toutes débouchent avec monotonie sur des crimes sans nombre dont l’instrument privilégié est le feu, symbole de pureté et symbole de l’enfer.»
Le Roi des aulnes – Michel Tournier
le sculpteur nazi Joseph Thorak, le modèle et l’œuvre
Cette photo montrant le sculpteur nazi Joseph Thorak, son modèle et son œuvre est tirée d’un site de vente de reproductions ou d’œuvres d’art nazi dont je ne nommerais pas le nom pour ne pas lui faire de la publicité. Voici comment ce site décrit le travail de ce sculpteur nazi qui était après Arno Breker le second « sculpteur officiel » du Troisième Reich :
« Thorak dépeint les hommes et les femmes comme la nature et la divinité le voulaient. Personne depuis Michel-Ange n’est jamais venu près de leur travail. C’était vraiment une inspiration céleste ! […] Tant que l’homme aspire à la finesse artistique et admire le corps humain dans sa meilleure représentation, les œuvres de Josef Thorak resteront dans les mémoires. […] Nous croyons ou du moins théorisons que l’artiste Thorak a inclus cela comme une sorte de témoignage supplémentaire de sa croyance fervente dans les idéaux et les valeurs artistiques imprégnés dans le national-socialisme. Hitler et les grands artistes comme Arno Breker, Carl Diebitsch et Wolfgang Willrich ont tous travaillé avec diligence pour remplacer les ordures dégénérées de Picasso malades qui régnaient dans la République de Weimar par l’héroïque, les scènes extrêmement réalistes des travailleurs des champs et des usines et la beauté de l’homme et la femme aryenne. »
Tout est dit dans cette photo et dans ce texte. Il ne s’agissait pas de représenter l’homme ou la femme tels qu’ils sont dans leur réalité psychique et charnelle mais dans une version idéalisée totalement irréelle. Les créatures « parfaites » sur le plan formel étant plutôt rares, voire inexistantes, l’artiste a du se « contenter » d’un modèle au corps commun de petite taille et aux larges hanches qu’il va s’attacher à transformer pour le magnifier en référence à son idéologie mortifère. C’est ce que Michel Tournier qualifie de « traitement barbare » parce qu’il nie l’unicité de l’être humain en tant qu’individu. Les cinq siècles qui ont suivi l’avancée humaniste de la Renaissance qui avait permis à l’art de se libérer des carcans de l’idéalisme religieux en promouvant une représentation de l’homme réaliste et profane sont d’un coup gommés. Cette attitude d’exaltation d’un modèle idéalisé et hors de portée exprime une forme de mépris pour l’être humain tel qu’il est dans sa réalité et le texte de Michel Tournier prend alors tout son sens : « La pureté est horreur de la vie, haine de l’homme, passion morbide du néant. Un corps chimiquement pur a subi un traitement barbare pour parvenir à cet état absolument contre nature. » D’un côté on gazait des millions d’êtres humains, assassinait les malades mentaux et les handicapés et de l’autre on exaltait une vision sublimée de l’homme nouveau. Cherchez l’erreur… Il faut croire que pour les nazis, l’horreur qu’ils accomplissaient n’était supportable que contrebalancée par l’état d’ivresse qu’apportait une vision fantasmée du futur où la race aryenne aurait atteint la perfection.
En contrepoint de cette beauté irréelle et glaçante sculptée par Thorak, je vous propose la statue d’Aristide Maillol, L’action enchaînée, du Jardin des Tuileries à Paris que je ne manque jamais de contempler lorsque je me trouve dans ce quartier et que je trouve d’une beauté saisissante à couper le souffle.
articles de ce blog liés :
Sans commentaires…
Michel de Montaigne (1533-1592)
« Le monde n’est qu’une branloire pérenne. Toutes choses y branlent sans cesse : la terre, les rochers du Caucase, les pyramides d’Egypte, et du branle public et du leur. La constance même n’est autre chose qu’un branle plus languissant. »
Michel de Montaigne, Essais, III, 2, Du repentir.
Toute ressemblance avec un ou plusieurs événements récents ou passés ne serait que pure coïncidence…
Dessin de Paul Weber
Sociétés de la norme et du contrôle
Extraits (remaniés) de la conférence « La Fabrique des Imposteurs » prononcée par le psychanalyste Roland Gori dans le cadre des conférences de l’Université permanente de l’Université de Nantes en référence à son ouvrage « La Fabrique des Imposteurs » (Actes sud, 2015)
PENSER : Textes de Roland Gori sur une citation du philosophe Jean-François Léotard…
« Dans un univers où le succès est de gagner du temps, penser n’a qu’un défaut mais incorrigible; c’est d’en faire perdre » – Jean-François Léotard.
« Aujourd’hui tous les dispositifs d’initiation sociale, d’éducation, de soins, de travail social ont pour objectif de vous éviter d’avoir à penser, de vous économiser d’avoir à penser. Vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point Penser n’est pas autant désiré que cela par les individus. Penser, comme décider d’ailleurs, ça mobilise de l’angoisse, l’angoisse de l’imprévu, de l’avenir, de la liberté, de la décision. Décider c’est renoncer et on n’aime pas renoncer et renoncer d’une certaine manière dans culpabilité ; C’est peut-être ce qui fait finalement que l’on se coule relativement facilement dans tous ces dispositifs de colonisation des mœurs qui sont des espèces de programmes de vie, de modes d’emplois, de protocoles calibrés.
Cela d’autant plus que les discours de légitimation sociale, les discours dominants qui fondent la fabrique de l’opinion publique et font la pensée du jour, les discours de légitimation sociale de pilotage des individus et des sociétés sont aujourd’hui de plus en plus passés d’un pilotage par de grands récits, récits mythiques, religieux ou politiques, du côté des chiffres et des lettres. Finalement, tous les dispositifs d’évaluation, qu’il s’agisse des agences d’évaluation de la recherche, de l’enseignement supérieur, de la santé, de la culture de l’information fonctionnent à peu près sur le modèle des systèmes d’évaluations financières qui déterminent le crédit que l’on peut accorder à une entreprise, à une collectivité territoriale, à un pays, cette pratique a pour effet de limiter la conception de la valeur. La valeur l’est plus que ce qui est soluble dans la pensée du droit des affaires, dans finalement ce qui peut se mesurer, se financiariser, se monétiser, ou ce qui peut demeurer conforme à des procédure. »
Aliénation : sur une citation du philosophe Giorgio Agamben.
« Le citoyen libre des sociétés démocratico-technologiques, les nôtres, est un être qui obéit sans cesse dans le geste même par lequel il donne un commandement » – Giorgio Agamben.
« Nous sommes pris dans une chaîne de production des comportements, dans un système qui nous assigne à des places qui sont des places fonctionnelles, des places instrumentales qui ne requiert pas d’avoir à penser, d’avoir même un état d’âme. C’est le gros problème de nos sociétés techniques. C’est que l’emprise de la technique est telle que la technique ne requiert pas de penser et n’exige pas de réfléchir, de réflexion morale, elle n’a pas d’état d’âme. La technique exige une exécution et donc même une fonction de commandement est une fonction de servitude. »
« Proposer pour les sociétés humaines dans leur recherche de toujours plus d’organisation, le modèle de l’organisme, c’est au fond, rêver d’un retour non pas même aux sociétés archaïques mais aux sociétés animales » – Georges Canghillem.
L’imposture
« L’imposteur est aujourd’hui dans nos sociétés comme un poisson dans l’eau : faire prévaloir la forme sur le fond, valoriser les moyens plutôt que les fins, se fier à l’apparence et à la réputation plutôt qu’au travail et à la probité, préférer l’audience au mérite, opter pour le pragmatisme avantageux plutôt que pour le courage de la vérité, choisir l’opportunisme de l’opinion plutôt que tenir bon sur les valeurs, pratiquer l’art de l’illusion plutôt que s’émanciper par la pensée critique, s’abandonner aux fausses sécurités des procédures plutôt que se risquer à l’amour et à la création. Voilà le milieu où prospère l’imposture ! Notre société de la norme, même travestie sous un hédonisme de masse et fardée de publicité tapageuse, fabrique des imposteurs. L’imposteur est un authentique martyr de notre environnement social, maître de l’opinion, éponge vivante des valeurs de son temps, fétichiste des modes et des formes.
« Là où le monde se change en simples images, les images deviennent des êtres réels et les motivations d’un comportement hypnotique. Le spectacle est le contraire du dialogue » – Guy Debord.
« Nous avons remplacé le dialogue par le communiqué. » – Albert Camus.
L’imposteur vit à crédit, au crédit de l’Autre.
Soeur siamoise du conformisme, l’imposture est parmi nous. Elle emprunte la froide logique des instruments de gestion et de procédure, les combines de papier et les escroqueries des algorithmes, les usurpations de crédits, les expertises mensongères et l’hypocrisie des bons sentiments. De cette civilisation du faux-semblant, notre démocratie de caméléons est malade, enfermée dans ses normes et propulsée dans l’enfer d’un monde qui tourne à vide. Seules l’ambition de la culture et l’audace de la liberté partagée nous permettraient de créer l’avenir. »
Roland Gori est psychanalyste à Marseille et professeur de psychologie et de psychopathologie cliniques à l’université d’Aix-Marseille 1. Il est l’auteur de nombreux ouvrages de psychanalyse. Fils unique d’un père d’origine toscane «hyperdoué», chef des services techniques sur le port de Marseille et communiste militant, et d’une mère catholique dont le cœur penche à droite, il grandit entre crucifix et volonté d’apprendre, heureux et choyé sous l’ombre portée de la guerre, dans une atmosphère à la Cavanna des Ritals. Ses parents sont pourtant tous deux marqués par le deuil, l’un ayant perdu son père à l’âge de neuf ans, l’autre sa sœur jumelle. Leur tristesse laisse sur lui une empreinte qu’il estime bienfaisante . Après une enfance de rêve, les choses se gâtent à l’entrée au lycée où son «étrangeté» de fils du peuple s’affronte aux moqueries de la bourgeoisie. Sauf que Roland, lui, s’en sort en fréquentant des petites bandes de quartier qui renforcent son goût du collectif. Contre son père, qui le rêve ingénieur, il abandonne la filière scientifique et passe un bac philo. Puis il enchaîne les petits boulots, fait des remplacements d’instituteur.
Monté à Paris il effectue sa première année de thèse avec Didier Anzieu et assiste à Nanterre aux événements de Mai 68. C’est pourtant à cette époque que, psychothérapeute, il entreprend une psychanalyse afin de mieux comprendre ses patients.
De retour dans le Sud, il enseigne comme assistant puis maître-assistant à Aix et Montpellier et commence une longue carrière d’expert universitaire. Dès 1990, il s’alarme de la « philosophie de la rentabilité » qui, au nom des valeurs perdues, prône l’Evaluation et défigure la science, préparant la descente aux enfers de la psychanalyse. Avec Pierre Fédida et Elisabeth Roudinesco, il organise la riposte et sera très actif lors de l’amendement Accoyer. En 1996, il publie un traité d’épistémologie de la psychanalyse, la Preuve par la parole, et en 2002, Logique des passions, son livre le plus personnel, « la livre de chair » de son parcours existentiel, sans doute induit par sa rencontre avec Marie-José Del Volgo et l’amour.
(Présentation retouchée de Camille Laurent, écrivain, à partir des sources Wikipedia et Libération dans Babelio, citations et extraits, c’est ICI)