Una furtiva lagrima Negli occhi suoi spunto: Quelle festose giovani Invidiar sembro. Che piu cercando io vo? Che piu cercando io vo? M’ama! Sì, m’ama, lo vedo, lo vedo. Un solo instante i palpiti Del suo bel cor sentir! I miei sospir, confondere Per poco a’ suoi sospir! I palpiti, i palpiti sentir, Confondere i miei coi suoi sospir Cielo, si puo morir! Di piu non chiedo, non chiedo. Ah! Cielo, si puo, si puo morir, Di piu non chiedo, non chiedo. Si puo morir, si puo morir d’amor.
Chanson « Caruso » par Lucio Dalla
Ici ou la mer et le vent hurlent Sur une vieille terrasse devant le golf de Surriento Un homme embrasse une femme qui avait pleuré Puis s’éclaircit la voix et recommence le chant
Je t’aime beaucoup Énormément tu sais C’est une chaine désormais Qui chauffe le sang dans tes veines, tu sais
Il vît les lumières au milieu de la mer Il pensa aux nuits en Amérique Mais c’étaient seulement les lumières et le sillage blanc d’une hélice
Il ressentit la douleur dans la musique, s’élever du piano Mais quand il vît la lune dévoilée par un nuage Même le mort lui sembla plus douce
Il regarda dans les yeux la fille aux yeux verts comme La mer Puis soudainement une larme coula et lui a cru s’étouffer
Je t’aime beaucoup Énormément tu sais C’est une chaine qui désormais Chauffe le sang dans tes veines, tu sais
Puissante passion ou chaque drame est un faux Qu’avec un peu de maquillage et avec la mimique tu peux devenir un autre Mais deux yeux qui te regardent aussi profondément Te font oublier les paroles qui troublent nos pensées
Ainsi tout devient petit, même les nuits en Amérique Tu te tournes et tu vois ta vie comme le sillage d’une hélice Mais si c’est la vie qui finie alors lui n’y pensa plus autant Bien au contraire il se sentait déjà heureux et continua sa chanson
Je t’aime beaucoup Énormément tu sais C’est une chaine désormais Qui chauffe le sang dans tes veines tu sais.
Enfin des chansons pleines de sens qui nous parlent et nous émeuvent… Par La Féline (Agnès Gayraud)
Effet de Nuit,
J’ai quitté la fête en pleine transe Le jour pas encore levé. La route est trempée quelle importance Je préfère rentrer à pieds Baignée par les ondes
Sueur tenace Puzzle de pensées La lune fait sa ronde Jeunesse passe Une tête dans d’autres réalités Comme on se déhanche Les décibels Montent le son Touchent le ciel Effet de nuit Marcher sans bruit Ciel blafard Qui déchire Dans un éclair La ville entière Posée sur Terre
J’entends encore pulser le silence Drôle de douceur cette hiver Le monde a changé quelle importance Nous sommes jeunes et nous sommes fiers Comme on se déhanche Les décibels Montent le son Touchent le ciel Effet de nuit Marcher sans bruit Ciel jaguar Qui déchire Dans un éclair La ville entière Posée sur Terre
***
Agnès Gayraud, une tête bien faite et bien pleine
Où est passé ton âme ?
Philosophe (elle est normalienne, agrégée de philosophie et auteure d’une thèse sur Adorno et d’un essai philosophique sur la musique populaire), chroniqueuse à Libération et Philosophie Magazine, musicienne et chanteuse (elle a fondé le projet musical La Féline), elle chante depuis 2008 et a à son actif de nombreuses chansons et plusieurs albums.
J’aime beaucoup le titre Où est passée ton âme paru en 2019 dans l’album Vie Future
La vie, comme l’histoire, se répète. Oh, comme le temps a passé. Je crains de revivre sans le savoir Cet instant qu’on a traversé.
Où est passée ton âme ? Cariño, no lo sé Oh,¿Dónde este mundo va? Dis-le moi, s’il te plaît.
Ils vivaient ensemble, attachés. J’en ai encore le cœur serré. Comme ils se ressemblaient, soulagés de n’avoir plus à s’expliquer.
Où est passée ton âme ? Cariño no lo sé Oh, où est passée son âme ? Au fond, moi je le sais.
(refrain) Il n’y a rien après la mort Elle va en beauté Il n’y a rien que les corps. Je veux vivre et danser
Combien de plaisir peux-tu prendre dans le temps qu’on t’a accordé ? Je t’ai vu pâlir, te défendre Je n’ai pas cessé de t’aimer.
Où va passer ton âme ? Viens, je sais le secret.
(refrain) Il n’y a rien après la mort Elle va en beauté Il n’y a rien que les corps. Je veux vivre et danser
C’est tout à fait par hasard en écoutant une émission diffusée par France Culture sur le thème de la jalousie en référence à un livre du philosophe Jean-Pierre Dupuy, » La Jalousie. Une géométrie du désir « , que j’ai appris l’existence du chanteur et musicien brésilien Caetano Veloso. En fait je le connaissais sans en avoir conscience puisque j’appréciais depuis longtemps son interprétation de deux chansons iconiques : « Sohnos » (Rêves), une chanson brésilienne et la chanson mexicaine « Cucurrucucu paloma » dont j’avais adoré la touchante interprétation dans le film Hable con ella (Parle avec Elle) du réalisateur espagnol Pablo Almadovar. Ces deux chansons ont la particularité d’être toutes les deux des chansons tristes qui chantent la fin d’un amour. La chanson Sonhos parle d’un homme qui aime une femme passionnément et à qui celle-ci annonce soudainement qu’elle s’est éprise d’un autre homme. Contre toute attente et malgré sa souffrance, il ne se révolte pas contre cette situation et remercie sincèrement cette femme pour ce qu’elle lui a apporté et appris. (Ça existe vraiment des hommes comme ça ?). D’après Jean-Pierre Dupuy qui se considère franco-brésilien pour des raisons familiales, il semble que ce comportement va à l’encontre de la mentalité machiste des hommes de ce pays dans lequel le nombre des meurtres d’origine passionnelle (ou plutôt pathologique) l’emporterait largement sur celui de ceux liés à la drogue… Quant à la chanson Cucurrucucu paloma écrite par le chanteur compositeur mexicain Tomas Méndes en 1954, elle parle de la perte d’un être cher et de la souffrance qui en résulte.
Sonhos
Sonhos
Tudo era apenas uma brincadeira E foi crescendo, crescendo, me absorvendo E de repente eu me vi assim completamente seu Vi a minha força amarrada no seu passo Vi que sem você não há caminho, eu não me acho Vi um grande amor gritar dentro de mim Como eu sonhei um dia
Quando o meu mundo era mais mundo E todo mundo admitia Uma mudança muito estranha Mais pureza, mais carinho mais calma, mais alegria No meu jeito de me dar
Quando a canção se fez mais clara e mais sentida Quando a poesia realmente fez folia em minha vida Você veio me falar dessa paixão inesperada Por outra pessoa
Mas não tem revolta não Eu só quero que você se encontre Saudade até que é bom É melhor que caminhar vazio A esperança é um dom Que eu tenho em mim, eu tenho sim
Não tem desespero não Você me ensinou milhões de coisas Tenho um sonho em minhas mãos Amanhã será um novo dia Certamente eu vou ser mais feliz
Quando o meu mundo era mais mundo…
Rêves
Tout était juste une plaisanterie Et elle a grandi, grandi M’absorbant Et soudain Je me suis vu ainsi complétement à toi J’ai vu ma force amarrée à tes pas J’ai vu que sans toi il n’y avait pas de chemin Je ne me trouvais pas J’ai vu un grand amour crier à l’intérieur de moi Comme je l’ai rêvé un jour.
Quand mon monde était plus un monde Et tout le monde admettait Un changement très étrange Plus de pureté, plus de tendresse Plus de calme, plus de joie Dans ma façon d’être Quand la chanson s’est fait plus claire, Et plus triste Quand la poésie est devenue une véritable folie dans ma vie Tu es venue me parler de cette passion inattendue Pour une autre personne.
Mais il n’y a pas de révolte, non Je veux juste que tu te trouves La mélancolie est parfois bonne C’est mieux que de marcher vide L’espérance est un don Que j’ai en moi Je l’ai, oui Il n’y a pas de désespoir, non Tu m’as appris des millions de choses J’ai un rêve entre les mains Demain sera un nouveau jour Je vais certainement être plus heureux.
Quand mon monde était plus un monde…
Cucurrucucu paloma
Caetano Veloso : dans cette interprétation magnifique les mots chantés que laissent échapper ses lèvres sont comme des oiseaux qui prennent leur envol dans une gracieuse lenteur. On comprend pourquoi les femmes qui l’écoutent posent sur lui un tel regard. Heureux l’homme sur qui se portent de tels regards…
Dicen que por las noches Ils disent qu’il passait Nomas se le iba en puro llorar, Ses nuits a pleurer Dicen que no comia, Ils disent qu’il ne mangeait pas Nomas se le iba en puro tomar, Il ne faisait que boire Juran que el mismo cielo Ils jurent que le ciel lui même Se estremecia al oir su llanto Se rétrécissait en écoutant ses pleurs Como sufrio por ella, Comme il a souffert pour elle Que hasta en su muerte la fue llamando Même dans sa mort il l’appellait Ay, ay, ay, ay, ay, … cantaba, Ay, ay, ay, ay. , ay…. il chantait Ay, ay, ay, ay, ay, … gemia, Ay, ay, ay, ay, ay…il gemissait Ay, ay, ay, ay, ay, … cantaba, Ay, ay, ay, ay, ay…. il chantait De pasión mortal… moria De passion mortelle…il mourrait Que una paloma triste Qu ‘une colombe triste Muy de manana le va a cantar, Va lui chanter tot le matin A la casita sola, A la maisonnette seule Con sus puertitas de par en par, Avec ses petites portes Juran que esa paloma Ils jurent que cette colombe No es otra cosa mas que su alma, N’est rien d’autre que son âme Que todavia la espera Qui attend toujours A que regrese la desdichada Le retour de la malheureuse Cucurrucucu… paloma, Cucurrucucu…. colombe Cucurrucucu… no llores, Cucurrucucu…ne pleure Las piedras jamas, paloma Jamais les pierres, colombe ¡Que van a saber de amores ! Que savent elles d’amour ! Cucurrucucu… paloma, ya no llores Cucurrucucu…colombe, ne pleure plus
Edvard Munch – Jalousie (1897). Le peintre expressionniste norvégien que ce thème obsédait en a réalisé à partir de 1895 pas moins de 16 représentations.
La Jalousie. Une géométrie du désir
Jean-Pierre Dupuy, philosophe, professeur émérite à l’Ecole Polytechnique, professeur à l’université Stanford (Californie), dans son livre » La Jalousie. Une géométrie du désir » (Seuil) propose une théorie générale de la jalousie en s’appuyant sur la théorie du désir mimétique défini par René Girard. France Culture, dans le cadre de l’émission La Conversation scientifique présentée par Etienne Klein, l’a invité à présenter son ouvrage. (59 mn)
Pour manifester ma peine aux souffrances que supporte avec courage et dignité actuellement le peuple italien je lui dédie cette bouleversante interprétation de 1956 par l’inoubliable Maria Callas du morceau « Vissi D’arte » (« J’ai vécu d’Art ») tiré de la Tosca de Pucini.
Paroles de chanson italienne « Vissi d’Arte«
Vissi d’arte, Vissi d’amore, J’ai vécu d’art, j’ai vécu d’amour, non feci mai mâle ad anima viva! Je n’ai jamais fait de mal à âme qui vive ! Con man furtiva Par une main cachée quante misere conobbi aiutai. J’ai soulagé toutes les misères que j’ai rencontrées. Sempre con fè sincera Toujours avec une foi sincère la mia preghiera Ma prière ai santi tabernacoli Sali. Est allée vers le saint tabernacle. Sempre con fè sincera Toujours avec une foi sincère diedi fiori agl’altar. J’ai offert des fleurs à l’autel. Nell ‘ ora del dolore En ce temps de douleur perchè, perchè, Signore, Pourquoi, pourquoi, Seigneur, perchè me ne rimuneri così? Pourquoi m’en récompenses-tu ainsi ? diedi gioielli della Madonna al manto, J’ai offert des joyaux pour le manteau de la Madone e diedi il canto agli astri, al ciel, Et offert mon chant aux étoiles, au ciel, che ne ridean più belli. Qui en resplendissaient, encore plus beaux. Nell’ora del dolor En ce temps de douleur perchè, perchè, Signor, Pourquoi, pourquoi, Seigneur, ah , perchè me ne rimuneri così? Ah, pourquoi m’en récompenses-tu ainsi ?
Maria Callas, Orchestre National de la Radiodiffusion Française dirigé par Georges Pretre, 1961.
***
Mon cœur s’ouvre à ta voix...
Mon cœur s’ouvre à ta voix comme s’ouvrent les fleurs Aux baisers de l’aurore ! Mais, ô mon bien-aimé, pour mieux sécher mes pleurs Que ta voix parle encore ! Dis-moi qu’à Dalila tu reviens pour jamais ! Redis à ma tendresse Les serments d’autrefois, ces serments que j’aimais ! Ah ! réponds à ma tendresse ! Verse-moi, verse-moi l’ivresse ! Ainsi qu’on voit des blés les épis onduler Sous la brise légère Ainsi frémit mon cœur, prêt à se consoler À ta voix qui m’est chère ! La flèche est moins rapide à porter le trépas Que ne l’est ton amante à voler dans tes bras ! Ah ! réponds à ma tendresse ! Verse-moi, verse-moi l’ivresse !
En 1906, Carl Jung recommande à Freud la lecture d’un roman au titre de Gradiva écrit trois années plus tôt par l’écrivain danois Wilhelm Jensen. Ce roman conte l’histoire d’un jeune archéologue allemand dénommé Norbert Hanold qui lors d’une visite au Musée archéologique de Naples découvre un bas-relief représentant une jeune fille de grande beauté se déplaçant avec une grâce telle qu’elle semble transmettre la vie à la pierre. Cette découverte le bouleverse profondément au point qu’il fait exécuter un moulage de la sculpture et le ramène chez lui en Allemagne. La fascination devient obsession après qu’il ait fait un rêve où il rencontre, dans le Pompéi antique avant l’éruption du Vésuve, cette jeune femme qu’il appelle alors Gradiva« celle qui avance », surnom, que les poètes anciens réservaient à Mars Gradivus, au dieu de la guerre s’en allant au combat. Il éprouve alors la conviction profonde que la Gradiva a effectivement vécue et qu’elle a été ensevelie lors de l’éruption du Vésuve. De retour à Pompéi, il croit soudain reconnaître la Gradiva parmi les ruines, mais l’apparition est bien une femme réelle, bien vivante et se révèle être sa gracieuse voisine et amie d’enfance, Zoé Bertgang. La jeune fille, qui est éprise de lui, a l’intelligence de ne pas s’opposer de front à son obsession. Se déguisant tout d’abord en Gradiva, elle parviendra finalement à réveiller son amour pour elle et à le guérir en créant les conditions d’un transfert de ses sentiments de la femme de pierre à la femme de chair, rompant ainsi le cercle du délire. L’histoire apparaît ainsi comme une belle métaphore de la cure psychanalytique.
Wilhelm Jensen (1837-1911) est un écrivain allemand né dans la province de Holstein à l’époque où celle-ci était encore danoise. Ecrivain prolifique dans l’Allemagne bismarckienne (poésie, nouvelles, roman historiques), il est par la suite tombé dans l’oubli et commence seulement à être réédité. Dans une correspondance avec Freud, le romancier a décrit comment l’idée du roman lui était venu en contemplant dans un musée romain un bas relief représentant une jeune femme :
L’extrait qui suit est tiré de la nouvelle Gradiva publiée en 1903 par l’écrivain allemand Wilhelm Jensen, qui connut une grande postérité au sein de la culture européenne, particulièrement auprès de Sigmund Freud et des surréalistes. L’auteur raconte comment un archéologue allemand, Norbert Hanold, se procure un moulage en plâtre d’un bas-relief qu’il a beaucoup admiré au musée Chiaramonti, un musée du Vatican, et comment, après avoir accroché la sculpture dans son bureau, il cherche à percer le mystère de la marche de la femme représentée, qu’il surnomme Gradiva — en latin, « celle qui marche en avant », forme féminine du surnom Gradivus donné au dieu Mars. Quelque temps après, Norbert Hanold fait un rêve dans lequel il se trouve à Pompéi lors de l’éruption du Vésuve en 79. Il aperçoit Gradiva, sans toutefois parvenir à l’avertir de l’imminence du danger. Profondément perturbé par ce rêve, il se rend d’abord à Rome, mais il y éprouve un fort sentiment de solitude et continue son voyage à Pompéi où il fait une rencontre inattendue, celle d’une jeune femme absolument identique à Gradiva, à qui il confie le trouble que lui fait ressentir cette ressemblance.
« L’idée de ce petit “morceau de fantaisie” a résulté de la fascination poétique pour la vieille image du bas-relief qui m’avait particulièrement impressionné. Je le possède en différents exemplaires, notamment dans une reproduction splendide de Narny à Munich (d’où le titre sur le frontispice), bien que j’aie cherché en vain pendant des années l’original du Musée National de Naples, sans jamais bien sûr le trouver, puisque j’ai appris qu’il se trouvait dans une collection à Rome. Si vous voulez, appelez cela une “idée fixe”, mais il s’est en effet formé dans mon opinion, et sans aucune raison préconçue, l’idée que ce bas-relief devait être à Naples, et qu’en outre celui-ci représentait une Pompéienne. Ainsi, je l’ai vu marcher dans mon esprit sur les dalles des ruines de Pompéi, que je connaissais très bien puisque j’y avais passé de très fréquents séjours. J’y passais mes meilleurs moments dans le silence de la mi-journée, heure à laquelle tous les autres visiteurs se précipitaient à table, et où je décidai d’exposer ma solitude à l’appel du soleil, et de tomber de plus en plus dans un état limite qui me permettait de faire passer mon œil de la vision éveillée à une vision totalement imaginaire. C’est de la possibilité de me plonger dans un tel état qu’a plus tard jailli Norbert Hanold. […] Le pied gauche était posé en avant, et le droit, qui se disposait à le suivre, ne touchait le sol que de la pointe de ses orteils, cependant que sa plante et son talon s’élevait presque verticalement. Ce mouvement exprimait à la fois l’aisance agile d’une jeune femme en marche, et un repos sûr de soi-même, ce qui lui donnait, en combinant une sorte de vol suspendu à une ferme démarche, ce charme particulier ». Gradiva, « celle qui s’avance » tel est le nom que lui donne le jeune homme.»
Freud qui avait lu le roman de W. Jensen en 1906 et acquis, lors d’une visite au musée vatican Chiaramonti, une reproduction du bas-relief, qu’il avait suspendu dans son bureau à Vienne et emporté avec lui lors de son exil à Londres, en 1938 publiera une analyse du récit sous le titre Der Wahn und die Träume in Jensens Gradiva (Le délire et les rêves dans la « Gradiva » de W. Jensen), qui inaugurera la série des commentaires sur cette œuvre. Dans cet essai pionnier pour les études psychanalytiques appliquées à la littérature, Freud va s’efforcer de montrer l’importance des rêves dans la psychanalyse. Il théorise la notion de refoulement en la comparant à l’archéologie qui s’efforce de restituer le passé lors des fouilles et de mettre en valeur les buts communs, selon lui, qui existent entre la littérature et de la psychanalyse. (crédit Wikipedia).
« De même que l’archéologue, d’après des pans de murs restés debout, reconstruit les parois de l’édifice, d’après les cavités du sol détermine le nombre et la place des colonnes et, d’après des vestiges retrouvés dans des débris, reconstitue les décorations et les peintures qui ont jadis orné les murs, de même l’analyste tire ses conclusions des bribes de souvenirs, des associations et des déclarations actives de l’analysé ». Freud, 1934
Gradiva de Wilhelm Jensen – Extraits de la publication « Pompéi, le rêve sous les ruines » Collection omnibus D’après la traduction de Roger Olivier (1903).
La jeune fille au cœur du vestige par Lucie Desideri (Tiré de l’essai Imaginaires archéologiques, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2008)
Le complexe de Gradiva – Théorie de la photographie, deuil et résurrection par André Gunthert (Études photographiques, mai 1997)
« Aria Marcella » de Théophile Gautier, « Gradiva » de W. Jensen et « la bête dans la jungle » de H. James. L’amour au dessous du volcan (CRLV, Centre de Recherche sur la Littérature des Voyages)
« Quand d’une aube d’amour mon âme se colore, Quand je sens ma pensée, ô chaste amant de Laure, Loin du souffle glacé d’un vulgaire moqueur, Éclore feuille à feuille au plus profond du cœur, Je prends ton livre saint qu’un feu céleste embrase, Où si souvent murmure à côté de l’extase.
Victor Hugo.
C’est le 6 avril 1327 que le poète italien Francesco Pétrarca, en français Pétrarque, qui a alors 23 ans, le temps comme il le décrit de sa « jeunesse en fleur » aperçoit une belle jeune femme à la sortie de la messe de l’église Sainte Claire d’Avignon et en devient immédiatement sans lui avoir adressé la parole éperdument amoureux. Mais cette amour ne pourra être pour le poète que platonique, la belle inconnue née Laura de Noves alors âgée de 17 ans a épousé 2 années plus tôt un noble provençal Hugues de Sade, l’un des ancêtres du célèbre Marquis de Sade. Ce coup de foudre ne devait rien au hasard puisque le poète se décrivit plus tard avoir été à cette époque porteur de « l’étincelle amoureuse ». Dans ces conditions, cet amour impossible ne pouvait être que sublimé et la jeune femme désirée et imaginée fut parée des qualités et des vertus les plus élevées. La réalité de l’existence de Laure a été mise en doute par certains historiens qui considéraient qu’elle n’était qu’un mythe poétique pourtant son existence semble corroborée par une lettre de Pétrarque à son ami Giacomo Colonna en 1338 dans laquelle il écrivait : « Il est dans mon passé une femme à l’âme remarquable, connue des siens par sa vertu et sa lignée ancienne et dont l’éclat fut souligné et le nom colporté au loin par mes vers. Sa séduction naturelle dépourvue d’artifices et le charme de sa rare beauté lui avaient jadis livré mon âme. Dix années durant j’avais supporté le poids harassant de ses chaînes sur ma nuque, trouvant indigne qu’un joug féminin ait pu m’imposer si longtemps une telle contrainte ».
Le poète célébrera cette passion et la dame de son cœur dans cent quinze sonnets en langue italienne connus sous l’appellation Sonnets à Laure rédigés dans le style raffiné et savant en vogue à l’époque dans toute l’Europe qu’on nomme aujourd’hui dolce stil nuovo apparut dans un premier temps à Bologne avec le poète Guido Guinizelli qui s’épanouira par la suite à Florence avec Dante Alighierie dont les thèmes les plus souvent traités sont, dans la tradition de l’amour courtois des troubadours, l’amour (l’amore) et la courtoisie (gentilezza) et où l’accent est mis sur la souffrance de l’amant et la femme aimée parée de toutes les vertus et idéalisée au point qu’elle est comparée à un ange offrant un chemin vers Dieu.
Sonnets à Laure (sonnets 12, 15, 16 et 20)
L’historien en littérature française Henri Weber cite dans un article compte-rendu consacré à un ouvrage écrit par Pierre Blanc consacré à Pétrarque : Canzonière, Le Chansonnier (c’est ICI ) l’explication psychanalytique donnée par cet auteur aux attitudes narcissique et de refoulement de Pétrarque et ses rapports avec les langues qu’il utilisait (latin, toscan et occitan) par la mort de sa mère lorsqu’il avait 14 ans à l’occasion de laquelle il avait composé écrire ses premiers vers, une élégie de trente-huit hexamètres latins :
« Tout d’abord P. Blanc souligne le paradoxe de mépris apparent de Pétrarque pour son œuvre en langue vulgaire qu’il veut faire passer pour une œuvre de jeunesse, alors qu’il la poursuit, en remanie la disposition et la corrige presque jusqu’à la veille de sa mort. C’est qu’il accorde la priorité au latin, en voulant ressusciter la gloire de Rome à travers l’élégance de sa langue, c’est qu’il réserve le toscan à son intimité. D’ailleurs latin et toscan ne sont pas les seules langues pratiquées par Pétrarque, près d’Avignon, il ne pouvait que parler occitan et lisait avec admiration les troubadours. Allant plus loin, P. Blanc cherche à expliquer ce refoulement et ce narcissisme par une audacieuse construction psychanalytique qui a pour fondement l’importance que la critique récente attache au poème latin que Pétrarque composa à l’âge de 14 ans lorsque sa mère mourut. il y exprimait à la fois le désir de la rejoindre dans la tombe et celui de lui consacrer toute son œuvre future. Tout le psychisme de Pétrarque dépendrait de cette fixation amoureuse sur l’image de la mère morte. Aussi, lorsqu’il rencontre Laure, en 1327, son amour sera marqué par la castration de ce premier deuil, Laure apparaîtra aussi inaccessible que la morte et comme elle sera une incitation à écrire...» – Henri Weber.
Les quatre sonnets présentés ci-dessus tirés d’une édition originale par Les Editions des Mille de l’ouvrage de Pétrarque publiée en 1913 et réimprimée à la demande par Hachette Livre, dans le cadre d’un partenariat avec la Bibliothèque nationale de France. Cette édition a été numérisée par la BnF et accessible sur sa bibliothèque numérique Gallica. Pour avoir accès aux 146 sonnets c’est ICI :
Les quatre pages suivantes présentent le frontispice de l’édition et le sommaire des 146 sonnets classés en 2 catégories : Sonnets à Laure vivante et Sonnets à Laure Morte.
Pour l’ambiance
« Une puce », un madrigal de Claude Lejeune (1530-1600) tiré de l’album « Autant en emporte le vent » par L »Ensemble Clément Janequin, Dominique Visse. (Harmonia Mundi)
Claude Lejeune fut un grand compositeur de la Renaissance de l’école franco-flamande. Bien que protestant {calviniste}. le musicien fut rapidement un habitué des cénacles intellectuels parisiens. Protégé par Guillaume d’Orange, Henri de Turenne, Agrippa d’Aubigné et le duc d’Anjou, il devint compositeur principal puis Maitre de la musique du roi Henri IV. Son oeuvre comprend de nombreuses chansons, dont le cycle le Printans {1603} sur des poèmes de Jean-Antoine de Baif, plus de trois cents psaumes calviniste, notamment les Dix psaumes de David {1564}, des arrangements latins, une douzaines de motets, un magnificat, une messe polyphonique, et trois fantaisies instrumental.
articles et vidéos liés
Pétrarque – Le temps vécu en flammes (émission de France Culture, 1979)
Apporte-moi verveine, menthe Δώσε μου δυόσμο να μυρίσω, et basilic, pour les sentir Λουίζα και βασιλικό Que je t’embrasse et que je sente Μαζί μ’αυτά να σε φιλήσω, monter en moi les souvenirs και τι να πρωτοθυμηθώ
La fontaine avec ses colombes Τη βρύση με τα περιστέρια, des Archanges l’épée qui luit των αρχαγγέλων το σπαθί Le jardin, étoiles qui tombent Το περιβόλι με τ’ αστέρια, ou bien la profondeur du puits και το πηγάδι το βαθύ
La nuit où nous suivions les rues Τις νύχτες που σε σεργιανούσα, menant à l’autre bout des cieux στην άλλη άκρη τ’ ουρανού Toi, montée là-haut, devenue Και ν’ ανεβαίνεις σε θωρούσα, sœur des étoiles sous mes yeux σαν αδελφή του αυγερινού
Marìna mon étoile verte Μαρίνα πράσινο μου αστέρι Marìna Vénus ma clarté Μαρίνα φως του αυγερινού Ma colombe d’île déserte Μαρίνα μου άγριο περιστέρι Marìna lys de mes étés Και κρίνο του καλοκαιριού
poème d’Odysséas Elýtis
Traduction de Michel Vokovitch in Anthologie de la poésie grecque contemporaine, Gallimard, 2000.
Poème magnifiquement mis en musique par Mikis Theodorakis et interprétée par la chanteuse Maria Farantouri.