Alain Badiou – Et s’il n’en reste qu’un (de communiste)…


 

Sortir du néolithique…

Conférence du philosophe Alain Badiou à l’institut Français de Grèce le 12 décembre 2019 : la Liberté, l’Egalité, la démocratie, le parlementarisme, la Nature, la technique, le néolithique, le capitalisme, l’impossible et le possible (entre autres)

Un texte fascinant de simplicité, de justesse et de clarté. Merci, Monsieur Badiou. (Nous avons supprimé les 9 mn 05 de la fastidieuse introduction)

Sur la Nature

       Depuis les origines de la philosophie on se demande ce qui recouvre le mot Nature. Il a pu signifier la rêverie romantique des soirs couchants, le matérialisme atomique de Lucrèce De Natura rerum (La Nature des Choses), l’Être intime des choses, la totalité de Spinoza « Deus sive Natura » (Dieu ou la Nature), l’envers objectif de toute culture, le site rural et paysan par opposition aux artifices suspects de la ville, « la terre elle ne ment pas » disait Pétain qui n’est pas une référence convenable. Ça peut désigner aussi la biologie par différence de la physique, la cosmologie au regard du petit monde qu’est notre planète, l’invariance séculaire au regard de la frénésie inventive, la sexualité naturelle au regard de la perversion, etc. Ce que je crois, c’est qu’aujourd’hui Nature désigne en fait surtout la paix des jardins et des villas, le charme touristique des animaux sauvages, la plage et la montagne où passer un agréable été et qui donc peut imaginer que l’homme soit comptable de la Nature lui qui n’est à ce jour qu’une puce pensante sur une planète secondaire dans un système solaire moyen sur les bords d’une galaxie banale.

Le capitalisme, c’est la forme contemporaine du néolithique*

     L’humanité depuis quatre ou cinq millénaires est organisée de façon immuable par la triade de la propriété privée qui concentre d’énormes richesses dans les mains de très petites oligarchies, de la famille où les fortunes transitent via l’héritage, de l’Etat qui protège par la force armée la propriété et la famille. C’est cette triade qui définit l’âge néolithique de notre espèce. Et nous y sommes toujours, voir plus que jamais. Le capitalisme c’est la forme  contemporaine du néolithique et son asservissement des techniques par la concurrence, le profit et la concentration du capital ne fait que porter à leur comble  les inégalités monstrueuses, les absurdités  sociales, les massacres guerriers et les idéologies délétère qui accompagne depuis toujours sous le règle historique de la hiérarchie de des classes le déploiement des techniques. Les techniques ont été les conditions initiales et non pas  du tout le résultat final de la mise en place néolithique.

Sur la nature humaine : De l’audace camarades, tentons l’impossible…*

    On ne peut pas parler de nature humaine mais d’un rapport intra-humain entre individu et sujet :

  • l’individu c’est l’ensemble des caractérisations empiriques d’une personne : ses capacités, sa langue, l’endroit où il a vécu, etc.. toutes une série de caractéristiques contraignantes à leur manière.
  • Le sujet c’est ce qui mesure ce dont il est capable au-delà justement de cette composition stricte qu’on peut dire naturelle.  une caractéristique fondamentale du sujet humain c’est  la découverte du fait qu’il est capable de choses dont il ne se savait pas capable.

    Ça, c’est la clé de l’humanité comme telle. L’humanité comme telle, ce n’est pas ce dont la nature humaine est capable, c’est le surgissement dans la nature humaine de ce dont elle se se savait pas capable et cette capacité à faire qui s’appelle la création, la capacité créatrice de l’humanité et je crois qu’on pourrait définir la politique la meilleure comme celle dont le point d’appui principal n’est pas la nature humaine mais le sujet humain qui s’appuie à tout moment sur l’hypothèse légitimement acceptée que le sujet humain est capable de ce qu’il ne se sait pas lui même capable. Cela veut dire qu’au delà la nature humaine il y a la dialectique entre ce qui est possible et ce qui est impossible. Je crois que le statut particulier de l’animal humain c’est de déplacer constamment les frontières entre le possible et l’impossible et de ne pas être déterminé pas même par l’impossibilité;

     Il faut tenir ferme sur un concept de l’humanité qui serait le déplacement constant et créateur de la frontière apparemment établie entre ce qui est possible et ce qui est impossible. L’homme c’est l’animal de l’impossible et finalement quand on me dit que le communisme est impossible, cela ne m’impressionne pas beaucoup car finalement parce que tout ce qui est intéressant est impossible.

    La réaction, c’est toujours la défense stricte de l’impossibilité ; le conservatisme c’est le gardien de l’impossible qui vise interdire le développement d’une nouvelle forme du sujet que créé par le déplacement entre le possible et l’impossible.

les titres sont de moi, le texte a été légèrement remanié.


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Jardin des Délices


     Gérard Manset, l’un des chanteurs et poète français parmi les plus grands et l’un des plus méconnus.
     Cherchez l’erreur,
     Et le pourquoi de l’erreur…

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c’est ICI

Le Jardin des Délices

Quand le monde autour de toi aura tant changé
Que toutes ces choses que tu frôlais sans danger
Seront toutes si lourdes à bouger
Seront toutes des objets étrangers
Où l’a-t-on rangé
Ce bout de verger
Avec ses fleurs grimpantes
Sa lumière en pente
Couleur de dragée
Quand le monde autour de toi sera mélangé
Que le drap de ta chambre dans l’ombre restera plongé
Que viendra la nuit aux pourpres orangés
Et sans rien de plus peut-être pour te protéger
Où l’a-t-on rangé
Ce bout de verger
Avec sa glycine
Comme une racine
Dans la terre plongée
Jardin des délices
Tourne comme une hélice Dans le fond du crâne
Tourne comme une hélice.

Gérard Manset – Album le Jardin des Délices, 2006.


Torino : la maison des surprises


Vu ces derniers jours dans une maison de Turin…

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Les portraits

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les Puttis

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Le mobilier

Parmi les documents affichés sur les murs

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Turin sous l’occupation des armées de la Révolution française

Le JOURNAL DE TURIN du Jeudi 28 Prairial de l’an X
(28 septembre 1802)

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EMPIRE FRANÇAIS
Département du Pô
Certificat de mariage de 1809 établi selon le code Napoléon

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                       Royal
THÉATRE  IMPERIAL

Madame la Comtesse …. (illisible)
a payé …. (illisible)
pour la Loge n° 14
Carnaval du 18/4 à 18/5
Turin le …. 1814


Et pour terminer, « Ciao Torino », une chanson de Turin de 1949 (auteurs Lampo & CA Prato) avec quelques vues anciennes de la ville. La chanson est interprétée par un enfant de Turin, Giuseppe Farassino dit « Gipo » (1934-2013), chanteur, acteur et homme politique italien qui a fait, à l’instar de beaucoup d’italiens, le grand écart politique et idéologique en débutant sa carrière comme communiste et en la terminant comme ministre régional pour le Piémont du parti populiste, d’extrême droite, eurosceptique et xénophobe de la Ligue du Nord aujourd’hui dirigée par Matteo Salvini.

CIAO TORINO

Ciao Torino, io vado via,
vado lontano a lavorare.
Io non so che cosa sia,
sento il cuore tremolare.

Ciao Torino, mia bella terra,
che tristezza, che pensieri.
Non mi sembra neanche vero
di doverti abbandonare.

Non vedrò più la Mole,
né i tuoi giardini.
E non porterò più
le belle ragazze al Valentino.

Ciao Torino, io vado via,
vado lontano a lavorare,
ma darei la vita mia
per poter presto ritornare.

Stamattina sono arrivati dei documenti,
li ha portati ridendo il postino.
O mia bella città, devo partire
e lasciarti, mia bella Torino.

Non vedrò più la Mole,
né i tuoi giardini.
E non porterò più
le belle ragazze al Valentino.

Ciao Torino, io vado via,
vado lontano a lavorare,
ma darei la vita mia
per poter presto ritornare

***


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La route est encore longue pour qui est loin devant… Au sujet d’un poème de Tomas Tranströmer


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     Quel livre emporteriez-vous avec vous lors d’un voyage dans les contrées lointaines en prévision d’un éventuel naufrage ?
     La Bible ? le Robinson Crusoé de Daniel Defoe ? un manuel de survie dans la nature sauvage ? Dans ce dernier cas, vous aurez le choix car entre 1983 et 2019, près de 130 livres ont paru sur le sujet, rien qu’en français. Si l’on en croit une liste d’ouvrages ayant trait à ce thème trouvée sur Internet, d’une moyenne de 2,97 livres par an pour les années 1980, le rythme des parutions n’a cessé d’augmenter et est passé à 7,3 pour les années 2010 ce qui jette un éclairage sur l’évolution des angoisses et des peurs dans nos sociétés.

     Pour ma part, j’emporterais plutôt avec moi le recueil de poèmes Baltique de mon poète préféré du moment : le poète suédois Tomas Tranströmer. C’est à la lecture de l’un de ses poèmes écrit à l’occasion d’un voyage qu’il avait effectué en Afrique que me sont venues ces réflexions. Stupide, me direz-vous… De quelle utilité me serait un recueil de poèmes sur une île déserte ? Un livre m’expliquant comment faire du feu à partir de deux morceaux de bois secs, tendre un lacet et comment choisir les plantes comestibles me serait bien plus utile. Peut-être, mais outre que je pense être capable après forces tâtonnements à parvenir seul à l’acquisition de ces savoirs, le livre de ce poète me sera d’une aide plus précieuse car il m’aidera à voir la part cachée de la réalité dont je serais entouré et me rattachera par l’esprit, dans l’isolement où je serais plongé, à l’humanité toute entière.
      Tomas Tranströmer est un visionnaire, pas au sens d’un précurseur, d’un devin ou d’un halluciné, mais au sens littéral du terme, « celui qui voit ce qui est » en opposition à ceux qui regardent mais ne voient pas, c’est-à-dire la plupart d’entre nous qui n’appréhendons que l’apparence superficielle des choses ce qui nous renvoie à la formule d’Héraclite pour qualifier le mensonge ou l’erreur selon laquelle « présents ils sont absents  »

Tomas Tranströmer (1931-2015)Tomas Tranströmer (1931-2015)

Dans un journal de voyage africain (1963)

Sur les toiles du peintre populaire congolais
s’agitent des silhouettes fines comme des insectes,
dépouillées de leur force humaine.

C’est le passage difficile entre deux façons d’être.
La route est encore longue pour qui est loin devant.

Le jeune homme surprit l’étranger égaré entre les cases.
Il ne savait pas s’il allait faire de lui un ami ou un objet
        de chantage.
Son indécision le troublait. Ils se quittèrent confus.

Sinon, les Européens restent groupés autour de la
       voiture, comme s’il s’agissait de leur Mère.
Les cigales sont aussi fortes que des rasoirs. Et
        la voiture repart.
Bientôt la belle nuit viendra s’occuper du linge sale.
        Dors.
La route est encore longue pour qui est loin devant.

Nous serviront peut-être ces poignées de mains en
         formation d’oiseaux migrateurs.
Nous servira peut-être de faire surgir la vérité des livres.
Il est nécessaire d’aller plus loin.

L’étudiant lit dans la nuit, il lit et lit pour la liberté
et devient, après son examen, une marche d’escalier
pour celui qui va suivre.
          Un passage difficile.
La route est encore longue pour qui est loin devant.

***


En montant une à une les marches d’escaliers du poème de Tranströmer :

« s’agitent des silhouettes fines comme des insectes,
dépouillées de leur force humaine. »

      La lecture de ce ver a tout de suite évoqué chez moi les magnifiques peintures rupestres du Sahara exécutées entre 10.000 et 6.000 ans avant notre ère qui présentent de manière stylisée les hommes de cette époque dans leur environnement naturel qui n’était pas encore désertique puisque ces représentations montrent des animaux qui ne peuvent vivre que dans un climat humide. Pourquoi ces hommes peints apparaissent-ils dépouillés de leur force humaine alors que dans les les peintures de groupes ou les fresques rupestres, ils apparaissent user de leur force en contrôlant les animaux domestiques ou en combattant les animaux sauvages ou d’autres hommes ? Peut-être parce que ces représentations d’ensemble d’une petite partie de l’humanité sont vues de haut ou avec recul avec l’effet de distanciation et d’éloignement  qui en résulte, réduisant les les hommes à la taille d’insectes insignifiants. Le regard porté sur ces effigies humaines est alors le même que celui que portent les dieux sur les misérables humains que nous sommes.

art rupestre du Sahara - site de Tassili n'Ajjer (entre 10.000 et 6.000 ans av. JC) .jpgart rupestre du Sahara – site de Tassili n’Ajjer.


« C’est le passage difficile entre deux façons d’être.
La route est encore longue pour qui est loin devant. »

      La communication entre deux cultures aussi éloignées que les cultures européennes et africaines traditionnelles n’est pas donnée. Elle nécessite un désir et un effort commun de compréhension qui passe par une ouverture à l’autre. Pour y parvenir, la route est longue pour celui qui se situe, ou qui pense se situer, loin devant l’autre au niveau de l’évolution et du développement. Cette manière de poser le problème, en s’appuyant sur le paradigme de « l’avancée » de la culture européenne qui se situerait « loin devant » les cultures indigènes traditionnelles est peut-être la cause des difficultés de compréhension et l’allongement de la route qui en résulte. Si nous n’avions pas conscience d’être « loin devant », mais seulement « à côté », peut-être que la communication serait-elle immédiate… Ce thème de l’éloignement des cultures, réel ou supposé, est récurrent dans le poème, le vers qui le traite étant répété à deux reprises.


« Le jeune homme surprit l’étranger égaré entre les cases.
Il ne savait pas s’il allait faire de lui un ami ou un objet
       de chantage.
Son indécision le troublait. Ils se quittèrent confus. »

      Terrible dilemme pour les sociétés que l’apparition de l’Autre, celui que les Grecs  anciens appelaient le barbare.  Vient-il avec de mauvaises intentions ? Présente-t-il un danger potentiel ? Est-il ou peut-il devenir un rival ? Les indiens d’Amérique ont du se mordre les doigts d’avoir secouru les pèlerins du Mayflower et leur avoir ainsi permis de survivre… Un étranger égaré est en situation de faiblesse, il a besoin d’aide. Trois attitudes sont alors possibles pour l’indigène : l’aider et s’en faire un ami, profiter de sa faiblesse et s’en faire un ennemi, Ne pas choisir entre ces deux attitudes, c’est celle que l’indigène a choisi. Une occasion a été perdue…


« Sinon, les Européens restent groupés autour de la
    voiture, comme s’il s’agissait de leur Mère. »

      Voilà un exemple de la qualité de vision propre au poète qu’est Tomas Tranströmer : les Européens mal à l’aise face à ce monde étranger qu’ils ne maîtrisent pas et qui les intimide se pressent autour le l’objet qui symbolise leur civilisation et est susceptible de les protéger et de leur permettre la fuite. La voiture espace clos et protecteur s’apparente dans leur inconscient à la matrice maternelle. On connaissait la voiture comme représentation pour certains hommes du phallus tout-puissant mais pas encore de la mère protectrice…


« Les cigales sont aussi fortes que des rasoirs. Et
        la voiture repart. »

     Quel rapport me direz-vous entre une cigale et un rasoir ? Sur le plan formel un rasoir ancien que l’on appelait rasoir droit, sabre ou plus familièrement « coupe-choux » possédait une lame fixe pivotante qui se repliait dans le manche appelé « chasse » qui était parfois décorée de motifs. Lorsque la lame est repliée dans la chasse, rien n’interdit de l’assimiler à un insecte longiligne du genre cigale, le corps de l’insecte étant couvert par les ailes qui forment alors comme un étui protecteur de la même que la chasse du rasoir protège la lame. Dans le même ordre d’idée, signalons que le mot élytres qui désigne les deux ailes antérieures carapaçonnées qui protègent les véritables ailes de certains insectes quand elles sont au repos vient du grec  ἔλυτρον, « elutron » qui signifie étui. Mais plus que la forme de la cigale, c’est le chant strident de la cigale « aigu comme la lame d’un rasoir » difficilement supportable pour certains surtout quand l’atmosphère apparaît tendue qui est à l’origine de la métaphore. Dans le midi de la France, certains touristes ont demandé que les cigales soient éradiquées à l’aide d’insecticides car elles troublaient leur repos…

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«  Bientôt la belle nuit viendra s’occuper du linge sale.
    Dors. »

     On sait que pour Freud, le rêve était l’expression d’un désir et un moyen de d’approcher le contenu de l’inconscient, de ce qui était refoulé. Pour Jung, le rêve est non seulement une porte ouverte sur l’inconscient de chaque individu mais également sur le vaste réservoir de l’inconscient collectif et il possède en plus une fonction compensatrice qui permet de rétablir l’équilibre de son psychisme quand celui-ci est désorganisé ou en danger. C’est à ce rôle compensateur et réparateur que Tranströmer fait allusion quand il parle de nettoyage du linge sale pendant le sommeil.


«  Nous serviront peut-être ces poignées de mains en
     formation d’oiseaux migrateurs. »

      La main ouverte en éventail que l’on tend vers l’autre pour la poignée de mains peut s’apparenter sur le plan formel à la formation en V d’un vol d’oiseaux migrateurs mais plus qu’au niveau formel, c’est au niveau du symbole que la métaphore fonctionne. L’élan de la main ouverte qui se dirige vers l’autre symbolise une volonté d’ouverture et de l’espérance d’une relation bénéfique de la même manière que le but du déplacement des formations d’oiseaux migrateurs est l’accès à un environnement meilleur.

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«  Nous servira peut-être de faire surgir la vérité des livres.
      Il est nécessaire d’aller plus loin. »

    Cette ouverture vers l’autre sera utile pour la manifestation de la vérité qui n’est pas donnée mais qui s’acquiert par un effort continu et opiniâtre de recherche de la connaissance


«   L’étudiant lit dans la nuit, il lit et lit pour la liberté
et devient, après son examen, une marche d’escalier
pour celui qui va suivre.
     Un passage difficile.
La route est encore longue pour qui est loin devant. »

     Celui qui recherche la connaissance le fait pour se libérer de son aliénation, lorsqu’il y parvient même partiellement, c’est une étape qui bénéficie à l’espèce humaine toute entière. C’est un passage aussi difficile à franchir que celui cité au quatrième vers de la qui s’applique à la difficulté de communication entre des hommes de cultures différentes. Le chemin est long pour celui qui croît à tord ou à raison se trouver loin devant

Enki sigle


Femme sauvage


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    Dans l’article précédent consacré à la Calabre, j’évoquais une danseuse au physique et à la gestuelle impressionnants et débordante de sensualité, Anna Dego. Bien que la tarentella présentée et chantée par le ténor Marco Beasley soit de qualité, elle ne permettait pas à mon avis à Anna Dego d’exprimer le meilleur de sa technique chorégraphique et son talent. C’est donc une pizzica endiablée, danse de la région de Salento dérivée de la tarentelle, que je vous présente aujourd’hui, l’une des plus célèbre, la Pizzica di san Vito dei Normanni, dans laquelle la danseuse semble être la proie d’une possession. Rappelons que cette danse qu’est la tarentelle était considérée dans la croyance populaire causée par le morsure d’une araignée locale, la tarentule. Pour chasser « les dangers de l’âme », la tarantata (celle qui a été mordue) doit danser avec l’araignée, se faire elle-même araignée pour livrer un affrontement contre les puissances du mal, affrontement contrôlé par la danse et la musique. Les scientifiques ont révélés que cette araignée était en fait inoffensive. La fable du délire causé par la tarentule n’était en fait que le prétexte trouvé pour justifier et rendre acceptable par la société les manifestations d’hystérie et de libération des pulsions sexuelles exprimées par des femmes dont les aspirations intimes étaient étouffées par les contraintes d’une morale religieuse et sociale répressive. De là les attitudes provocantes arborées lors de la danse. Certains chercheurs rattachent cette pratique aux Dionysies, ces festivités religieuses annuelles dédiées au dieu Dionysos dans la Grèce antique qui auraient été importées par les Grecs lors de leur colonisation d’une grande partie de la Calabre.

Extrait d’un documentaire de 1962 de Gian Franco Mingozzi sur le Tarentisme

Pizzica di san Vito dei Normanni

     La musique est toujours jouée par l’ensemble L’ Arpeggiata de Christina Pluhar mais cette fois en Grèce à l’Athens Concert Hall en novembre 2013 et le chanteur est Vincenzo Capezzuto

     La vidéo suivante présente Anna Dego interpréter l’une de ses performance intitulée  « les dangers de l’âme » sur font musical de l’artiste Daniel Sepe (Titre Sovietica vesuvianità, album Vite Perdite)

***


Erika Pluhar – Hotel zur Einsamkeit, 1976


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   Chère Erika Pluhar, actrice et chanteuse autrichienne, vamp et femme fatale à ses débuts, devenue l’une des égéries des années soixante dix lorsqu’elle soutenait la révolution des œillets du Portugal et chantait de sa voix suave les chansons de Wolf Bierman, ce chanteur contestataire d’Allemagne de l’Est écartelé entre sa foi dans l’idéal communiste et la réalité tragique de ce qu’était alors la RDA et dont le moindre défaut est d’avoir eu comme belle-fille la chanteuse punk Nina Hagen. C’est aujourd’hui devenue une vieille dame de plus de quatre-vingt années, encore vive et alerte. La chanson d’Erika Pluhar  que j’ai choisi de vous présenter est Hotel zur Einsamkeit (Hôtel sur solitude), une interprétation de 1976 de la chanson française Hôtel des voyageurs crée en 1972 par le compositeur français Jacques Datin pour Serge Reggiani.

Hotel zur Einsamkeit

Auf den Stühlen welken unsere Kleider
Und der Morgen, dieser Ehrabschneider
Steht vor dem Fenster wie ein Baum
Und füllt mit Vogellärm den Raum
Die frischen Narben deiner Haut
Sind Schatten die die Sonne baut

Du träumst deinen Traum noch zu Ende
Mir zittert schon die Hand
Oh wie du lügst, wenn du schläfst
Geliebter, du mein Feind

Hotel zur Einsamkeit, Zimmer mit Bad
Blick auf den Park, und jede Nacht
Herr Sowieso, der seine Polonaise spielt
Hotel zur Einsamkeit, hier war es früher
Einmal schön, ich hasse die Erinnerung und den Selbstbetrug

Ein paar Mücken stoßen an die Decke. Plötzlich friert
Mich so, dass ich erschrecke. Die Worte möchte ich zurück,
Von gestern Abend, Stück für Stück, als ich dich bat
Nicht fortzugehen, jetzt, jetzt schäm’ ich mich so für
Mein Flehen.

Ich kann auch ohne dich leben, ich weiß bloß noch
Nicht wie. Mit der Zeit wird es sich geben
Glaub’ mir, Geliebter mein Feind

Hotel zur Einsamkeit, Zimmer mit Bad, Blick auf den Park,
Und jede Nacht Herr Sowieso, der seine Polonaise spielt
Hotel zur Einsamkeit, mein Gott, es ist wirklich wahr
Es ist das letzte Atemholen vor der Gleichgültigkeit

Die Komödie bricht hier ab. Die Helden bleiben beieinander
Und man applaudiert nicht. Ein lächerliches Wunder, so wie
Die Schauspieler nach Hause gehen, obwohl sie gerade eben
Gestorben sind
Ich bin deine Gewohnheit, bald wirst du meine Gewohnheit
Sein. Wenn ich die Koffer packe, wirst du mir auftragen
Auch deine Hemden hineinzugeben. Nie
Nie werden wir uns auf einem Bahnsteig trennen,
Einfach in verschiedene Züge einsteigen, wir sind erbärmlich
Mein Geliebter, mein Feind

Hotel zur Einsamkeit, Zimmer mit Bad, Blick auf den Park, es
Ist doch alles nicht mehr wahr, ich lieb’ dich nicht
Ich lieb’ dich doch, was ist denn noch wahr
Hotel zur Einsamkeit, Zimmer mit Bad, Block auf den Park
Und jede Nacht Herr sowieso, der seine Polonaise spielt.

Musique :  Jacques Datin


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  • And the damage is done…


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    Damage

    I found the way
    By the sound of your voice
    So many things to say
    But these are only words
    Now I’ve only words
    Once there was a choice

    Did I give you much?
    Well, you gave me things
    You gave me stars to hold
    Songs to sing

    I only want to be loved

    And I hurt and I hurt
    And the damage is done
    You gave me songs to sing
    Shadow and sun
    Earthbound, starblind
    Tied to someone

    Why didn’t I stay?
    Why couldn’t I?
    So many lives to cross
    Well, I just had to leave
    There goes everything
    Everything

    Can I meet you there?
    God knows the place
    And I’ll touch your hand
    Kiss your face

    We only want to be loved
    We only want to be loved

    I only want to be loved
    And I hurt and I hurt
    And the damage is done
    You gave me songs to sing
    Shadow and sun
    Earthbound, starblind
    Tied to someone

    ***


    David Sylvian et Robert Fripp.jpg

         La magnifique chanson Damage interprétée par le duo de musiciens hors pair David Sylvian et Robert Fripp fait partie de l’album Live éponyme paru en 1994 qui avait été enregistré par les deux musiciens lors du dernier concert donné lors leur tournée commune de 1993 et mixé par Fripp. Il a été réédité de manière heureuse en 2001 avec une qualité de son nettement améliorée par David Sylvian (Label Virgin). 


    Retour sur Notre-dame


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          Débat surréaliste sur LCI hier soir autour de David Pujadas sur le thème «Du bien pour un mal». Finalement la destruction de Notre-Dame aurait ceci de bénéfique qu’elle aurait servi de révélateur à des vérités jusque là cachées qui font beaucoup de bien à entendre… Il est bien connu en psychologie que le déni est l’un des moyens choisi de manière inconsciente par les personnes victimes d’un traumatisme pour échapper à la dureté de leur situation. Parmi ces « divines surprises » révélées par ce drame figurent en premier lieu les sentiments d’affliction et la solidarité affichée par la communauté internationale, interprétées par Pujadas et certains de ses invités comme la reconnaissance de l’universalité de la France et le signe que nous sommes finalement toujours un grand pays capable de faire vibrer le cœur de la Planète et ces messieurs de se réjouir avec fierté des déclarations de Trump déclarant que Notre-Dame était « l’un des grands trésors du monde » oubliant que la veille il donnait des conseils à ces stupides français qui n’avaient même pas pensé à utiliser des Canadairs… D’autres invités voyaient dans la douleur et le recueillement silencieux des foules massées devant le monument le signe que la France était toujours un pays profondément attaché au christianisme alors même que les deux tiers des français ne s’identifient à aucune religion et que 40 % d’entre eux se considèrent comme athées. On se console comme on peut…

     Rédemption

            La compassion aujourd’hui manifestée par le monde n’a rien à voir avec la grandeur de la France. Les gens se sentent touchés, voilà tout, comme ils ont été touchés par la chute des Tours du World Trade Center même s’ils n’étaient pas d’accord avec la politique américaine, par la destruction de Palmyre ou des Bouddhas de Bâmiyân en Afghanistan. Ils se mettent à notre place, imaginant ce qu’ils ressentiraient si un lieu ou un monument de leur ville ou de leur pays qu’ils chérissaient connaîssait un sort analogue. En ce qui concerne Notre-Dame, l’émotion a été décuplée par le fait qu’elle était un monument emblématique de l’Occident dont l’image a été reproduite dans le monde entier à des milliards d’exemplaires que ce soit en peinture, en photographies dans les magazines ou au cinéma et à la télévision et qu’elle recevait 14 millions de visiteurs chaque année. Alors, soyons humbles et n’essayons pas d’échapper à notre responsabilité en nous gargarisant de je ne sais quel amour ou admiration que manifesterait le monde à notre égard. Nous avons failli de manière inexcusable (voir notre article précédent) et ne cherchons pas à échapper à nos responsabilités. Il faudra pour cela que l’on boive la coupe jusqu’à la lie. La seule manière de sortir de cette situation est de retrousser nos manches et d’engager toutes nos forces et notre intelligence pour reconstruire le plus vite possible ce joyau en ajoutant à ce qui nous avait été légué les siècles passés quelque chose de plus qui serait le génie de notre modernité. C’est par de tels actes que nous réparerons nos erreurs et pourrons mériter vraiment la considération du monde et peut-être même son admiration.

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    La Forêt

    De l’audace et encore de l’audace…

      À ce propos, le débat en cours sur la nature de la reconstruction, entre une reconstruction « à l’identique » et une reconstruction « évolutive » qui ferait appel à des techniques contemporaines me semble être un faux débat. Il convient simplement d’appliquer à la reconstruction de Notre-Dame le même esprit synthétique qui avait prévalu lors de son élaboration qui s’était déroulé sur plusieurs siècles, celui du pragmatisme et de l’imagination dans le choix des techniques de constructions, de la recherche de l’élévation, de la légèreté et de la transparence obtenue par l’économie de la matière et enfin de la recherche de l’unité et de l’harmonie dans le rapport qui existe entre le détail et le tout. C’est l’application de ces principes qui avait fait que Notre-Dame était un chef-d’œuvre de perfection et ce sont ces principes qu’il faut continuer à mettre en application pour la reconstitution de la toiture, de la flèche et de la voûte. Une cathédrale gothique comporte un espace caché situé entre la voûte de pierre et la toiture proprement dite à forte pente. Cet espace est occupé par la charpente qui, compte tenu de la dimension des bâtiments et des efforts gigantesques à soutenir, se devait d’être massive et sophistiquée. De là l’impressionnante et magnifique charpente de Notre-dame à laquelle on avait donné le nom de « Forêt ». On aurait pu ajouter  à ce nom l’adjectif de « sacré » car les nombreux chênes que l’on avait abattus pour pouvoir réaliser cette charpente étaient pour la plupart des arbres centenaires qui s’étaient nourris de la terre de l’île de France et avaient été témoins de plusieurs siècles de son histoire. La « Forêt » des combles de Notre-Dame se rattachait ainsi aux « Nemeton » gaulois, ces bois sacrés des ancêtres païens de ses bâtisseurs. N’en déplaise aux forestiers français qui ont proposé de fournir les chênes qui seraient nécessaires à la reconstruction à l’identique de la charpente de Notre-dame, une telle reconstitution serait absurde. De la même manière que les bâtisseurs du XIIe et du XIIIe siècles avaient utilisés avec intelligence et imagination les matériaux et les techniques que leur offrait leur époque, il faut que la reconstruction de la toiture de Notre-Dame fasse appel aux techniques les plus avancées qu’offre la nôtre. C’est à bon escient que j’ai employé le mot toiture et non pas charpente, car si les techniques anciennes imposaient de dissocier la couverture de son support constitué par la charpente, les techniques modernes permettent de synthétiser les deux fonctions. Le choix d’une telle structure qui pourrait être du type nervuré ou arborescent à inventer ferait l’objet d’une recherche approfondie qui devrait être menée, sinon avec la même foi religieuse, mais tout au moins avec le même enthousiasme que celui qui habitait les bâtisseurs de cathédrales et les faisait se dépasser.

    Le défi à relever

         Le monde entier a été ému par la destruction de Notre-Dame et est prêt à apporter son aide, pourquoi ne pas le mettre alors à contribution en organisant un vaste concours d’idées auprès des ingénieurs, des architectes et des artistes du monde entier pour définir l’œuvre d’art ultime emblématique de notre époque qui viendrait s’inscrire dans la cathédrale tel un joyau dans son écrin. La reconstruction de la cathédrale deviendrait alors une affaire mondiale qui mobiliserait des centaines d’équipes et nul doute que cette consultation rencontrerait tant au niveau de la participation que des appels de fonds, un immense succès. Cette structure extraordinaire à inventer resterait visible à travers les ouvertures de la voûte créées par l’incendie et qui seraient conservées. Elles porteraient ainsi témoignage de cet événement terrible et rappellerait à l’homme la fragilité de sa présence sur terre et de ses réalisations mais aussi la force de sa volonté et de sa capacité à se transcender et créer le beau et le sublime. On me critiquera sans doute de vouloir conserver les stigmates de ces blessures infligées à la cathédrale mais cet événement à bouleversé nos vies et sera, je l’espère, le déclencheur d’une prise de conscience ; dans ces conditions pourquoi faudrait-il le faire disparaître et jeter sur lui le voile de l’oubli ? La religion catholique elle-même n’a t’elle pas bâtie toute une exégèse sur les stigmates du Christ et ceux-ci ne sont-ils pas abondamment représentés dans toute l’iconographie religieuse ?

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    Andrea Mantegna – Lamentation sur le Christ mort, 1480
    Le peintre a représenté les plaies du Christ suite à la crucifixion

           Comme il a été cité plus haut, l’un des principes fondamentaux qui animaient l’esprit des bâtisseurs de cathédrales était la recherche absolue de l’élévation, celle de l’élévation vers le ciel qui était une élévation vers Dieu. C’est la raison pour laquelle la construction devait être la plus légère possible et que la matière devait être réduite au maximum jusqu’à se confondre avec les lignes de force de la structure qui prenaient alors la forme de nervures. La conservation et la mise en valeur des ouvertures de la voûte ajoutera au sentiment d’élévation que l’on ressentait lorsqu’on levait les yeux vers la nef par la vision supplémentaire d’une partie de l’espace des combles et de la structure nervurée de la nouvelle charpente. On retrouverait ainsi dans un but d’unité les principes fondamentaux qui avaient prévalus à la construction de la cathédrale. Le fait que les phases de réflexion et de réalisation seraient ouvertes à tous ceux qui dans le monde éprouvent un attachement à Notre-Dame et auraient fait leur le combat engagé pour sa renaissance ferait que le défi à relever ne serait plus alors spécifiquement français mais deviendrait mondial par l’appropriation par le monde entier de ce monument emblématique. Ce serait cela la véritable universalité que nous, Français, pourrions alors revendiquer et non pas une universalité chauvine et rétrécie, dépassée parce que vide de sens dans le monde d’aujourd’hui.

    Enki sigle

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    Quand l’Enfer se confond avec le ciel…


    Relevé depuis sur les médias :

    •  17 avril : Le gouvernement va organiser un concours d’architecte pour la reconstruction de la flèche mais pourquoi limiter l’objet du concours à la flèche et ne pas y intégrer la charpente, la toiture et la voûte . D’autre part pourquoi ne pas dissocier la phase  » proposition d’idées » de la phase « conception-réalisation ». Dans un premier temps, le concours d’idée serait ouvert à l’ensemble du public et la phase conception-réalisation serait réservée aux hommes de l’art dans des équipes pluridisciplinaires étendues.
    • 18 avril : Des architectes de Dijon se sont posé le même problème que moi mais vont encore plus loin dans la transgression : organiser un concours international qui ne serait pas limité à la flèche et pour leur part proposent de réaliser une promenade panoramique sur la voûte qui permettrait aux visiteurs de contempler Paris à travers une toiture vitrée. Ce qui me gêne dans cette proposition ce n’est pas tant la « transgression architecturale » que le fait qu’à cette occasion on change totalement de paradigme sur le plan fonctionnel. La Cathédrale ne serait plus dans ce cas le lieu de recueillement et de contemplation intime qu’elle avait été jusque là mais, avec une part d’elle-même vouée à être un déambulatoire à touristes visible de l’extérieur, aurait son image totalement dénaturée. Ce genre de proposition qui privilégie le « Grand geste architectural » au détriment de la fonction réelle du bâtiment est totalement contre-productif. Par son caractère excessif et profanateur vis-à-vis de la sacralité du lieu, il apporte de l’eau au moulin de ceux qui s’accrochent à une action purement reproductrice du bâtiment contre ceux qui proposent de s’ouvrir à une réflexion sur le plan technique en ne s’interdisant pas le choix de matériaux contemporains et de techniques modernes pour sa rénovation.

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    Le projet des architectes de Dijon. Combien paraît pathétique la présence de la Croix sur le parcours à touristes…


    le cerveau reptilien


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    Le cerveau reptilien

    Elle marchait sur la plage,
    le portable à l’oreille.
    Elle ne voyait rien
    de tout ce qui gravitait
    autour d’elle,
    ni le sable, ni la fuite des nuages,
    ni le déferlement des vagues, 

    ni moi…

    Elle n’entendait rien
    de tout ce qui bruissait
    autour d’elle,
    ni le souffle languissant du vent, 
    ni le fracas des vagues,
    ni moi, 
    qui lui a dit 
    quelque chose de gentil,
    en passant.

    C’était le grand reptile                                           
    tapi au fond d’elle-même
    qui dirigeait ses pas…
    il a posé son regard froid 
    sur moi…
    et n’a pas jugé utile
    de transmettre le message… 

    Enki  –  Baie d’Audierne, 31 juillet 2011

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    Au paradis, j’ai aperçu une île…


    elytis_kolaz.jpgCollage de Odysséas Elytis

    Au paradis, j’ai aperçu une île…

    Au paradis, j’ai aperçu une île
    Semblable à  toi et une maison au bord de la mer
    Avec un grand lit et une petite porte
    J’ai jeté un écho dans les profondeurs
    Pour me voir chaque matin quand j’émerge
    La moitié pour te voir passer à travers les eaux

    La moitié pour pleurer pour toi au paradis.

    Extrait de « Le monogramme » d’Odysséas Elytis.

    Pour lire le poème en entier, c’est  ICI