C’est tout à fait par hasard en écoutant une émission diffusée par France Culture sur le thème de la jalousie en référence à un livre du philosophe Jean-Pierre Dupuy, » La Jalousie. Une géométrie du désir « , que j’ai appris l’existence du chanteur et musicien brésilien Caetano Veloso. En fait je le connaissais sans en avoir conscience puisque j’appréciais depuis longtemps son interprétation de deux chansons iconiques : « Sohnos » (Rêves), une chanson brésilienne et la chanson mexicaine « Cucurrucucu paloma » dont j’avais adoré la touchante interprétation dans le film Hable con ella (Parle avec Elle) du réalisateur espagnol Pablo Almadovar. Ces deux chansons ont la particularité d’être toutes les deux des chansons tristes qui chantent la fin d’un amour. La chanson Sonhos parle d’un homme qui aime une femme passionnément et à qui celle-ci annonce soudainement qu’elle s’est éprise d’un autre homme. Contre toute attente et malgré sa souffrance, il ne se révolte pas contre cette situation et remercie sincèrement cette femme pour ce qu’elle lui a apporté et appris. (Ça existe vraiment des hommes comme ça ?). D’après Jean-Pierre Dupuy qui se considère franco-brésilien pour des raisons familiales, il semble que ce comportement va à l’encontre de la mentalité machiste des hommes de ce pays dans lequel le nombre des meurtres d’origine passionnelle (ou plutôt pathologique) l’emporterait largement sur celui de ceux liés à la drogue… Quant à la chanson Cucurrucucu paloma écrite par le chanteur compositeur mexicain Tomas Méndes en 1954, elle parle de la perte d’un être cher et de la souffrance qui en résulte.
Sonhos
Sonhos
Tudo era apenas uma brincadeira
E foi crescendo, crescendo, me absorvendo
E de repente eu me vi assim completamente seu
Vi a minha força amarrada no seu passo
Vi que sem você não há caminho, eu não me acho
Vi um grande amor gritar dentro de mim
Como eu sonhei um dia
Quando o meu mundo era mais mundo
E todo mundo admitia
Uma mudança muito estranha
Mais pureza, mais carinho mais calma, mais alegria
No meu jeito de me dar
Quando a canção se fez mais clara e mais sentida
Quando a poesia realmente fez folia em minha vida
Você veio me falar dessa paixão inesperada
Por outra pessoa
Mas não tem revolta não
Eu só quero que você se encontre
Saudade até que é bom
É melhor que caminhar vazio
A esperança é um dom
Que eu tenho em mim, eu tenho sim
Não tem desespero não
Você me ensinou milhões de coisas
Tenho um sonho em minhas mãos
Amanhã será um novo dia
Certamente eu vou ser mais feliz
Quando o meu mundo era mais mundo…
Rêves
Tout était juste une plaisanterie
Et elle a grandi, grandi
M’absorbant
Et soudain
Je me suis vu ainsi complétement à toi
J’ai vu ma force amarrée à tes pas
J’ai vu que sans toi il n’y avait pas de chemin
Je ne me trouvais pas
J’ai vu un grand amour crier à l’intérieur de moi
Comme je l’ai rêvé un jour.
Quand mon monde était plus un monde
Et tout le monde admettait
Un changement très étrange
Plus de pureté, plus de tendresse
Plus de calme, plus de joie
Dans ma façon d’être
Quand la chanson s’est fait plus claire,
Et plus triste
Quand la poésie est devenue une véritable folie dans ma vie
Tu es venue me parler de cette passion inattendue
Pour une autre personne.
Mais il n’y a pas de révolte, non
Je veux juste que tu te trouves
La mélancolie est parfois bonne
C’est mieux que de marcher vide
L’espérance est un don
Que j’ai en moi
Je l’ai, oui
Il n’y a pas de désespoir, non
Tu m’as appris des millions de choses
J’ai un rêve entre les mains
Demain sera un nouveau jour
Je vais certainement être plus heureux.
Quand mon monde était plus un monde…
Cucurrucucu paloma
Caetano Veloso : dans cette interprétation magnifique les mots chantés que laissent échapper ses lèvres sont comme des oiseaux qui prennent leur envol dans une gracieuse lenteur. On comprend pourquoi les femmes qui l’écoutent posent sur lui un tel regard. Heureux l’homme sur qui se portent de tels regards…
Dicen que por las noches Ils disent qu’il passait
Nomas se le iba en puro llorar, Ses nuits a pleurer
Dicen que no comia, Ils disent qu’il ne mangeait pas
Nomas se le iba en puro tomar, Il ne faisait que boire
Juran que el mismo cielo Ils jurent que le ciel lui même
Se estremecia al oir su llanto Se rétrécissait en écoutant ses pleurs
Como sufrio por ella, Comme il a souffert pour elle
Que hasta en su muerte la fue llamando Même dans sa mort il l’appellait
Ay, ay, ay, ay, ay, … cantaba, Ay, ay, ay, ay. , ay…. il chantait
Ay, ay, ay, ay, ay, … gemia, Ay, ay, ay, ay, ay…il gemissait
Ay, ay, ay, ay, ay, … cantaba, Ay, ay, ay, ay, ay…. il chantait
De pasión mortal… moria De passion mortelle…il mourrait
Que una paloma triste Qu ‘une colombe triste
Muy de manana le va a cantar, Va lui chanter tot le matin
A la casita sola, A la maisonnette seule
Con sus puertitas de par en par, Avec ses petites portes
Juran que esa paloma Ils jurent que cette colombe
No es otra cosa mas que su alma, N’est rien d’autre que son âme
Que todavia la espera Qui attend toujours
A que regrese la desdichada Le retour de la malheureuse
Cucurrucucu… paloma, Cucurrucucu…. colombe
Cucurrucucu… no llores, Cucurrucucu…ne pleure
Las piedras jamas, paloma Jamais les pierres, colombe
¡Que van a saber de amores ! Que savent elles d’amour !
Cucurrucucu… paloma, ya no llores Cucurrucucu…colombe, ne pleure plus
Edvard Munch – Jalousie (1897). Le peintre expressionniste norvégien que ce thème obsédait en a réalisé à partir de 1895 pas moins de 16 représentations.
La Jalousie. Une géométrie du désir
Jean-Pierre Dupuy, philosophe, professeur émérite à l’Ecole Polytechnique, professeur à l’université Stanford (Californie), dans son livre » La Jalousie. Une géométrie du désir » (Seuil) propose une théorie générale de la jalousie en s’appuyant sur la théorie du désir mimétique défini par René Girard. France Culture, dans le cadre de l’émission La Conversation scientifique présentée par Etienne Klein, l’a invité à présenter son ouvrage. (59 mn)
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