Ah, la voix suave d’Erika Pluhar…
DAS BARLACH-LIED Le chant de Barlach
Ach Mutter mach die Fenster zu Oh Mère, ferme la fenêtre
Ich glaub es kommt ein Regen Je crois que la pluie arrive
Da drüben steht die Wolkenwand Il y a là-bas un mur de nuages
Die will sich auf uns legen qui veut s’abattre sur nous
Was soll aus uns noch werden Qu’allons-nous encore devenir ?
Uns droht so große Not Un si grand danger nous menace
Vom Himmel auf die Erden Du Ciel sur la Terre
Falln sich die Engel tot Tombent les anges morts
Ach Mutter mach die Türe zu Oh ! Mère, ferme la porte
Da kommen tausend Ratten des milliers de rats sont en route
Die hungrigen sind vorneweg Les affamés sont en avant-garde
Dahinter sind die satten suivis par les rassassiés
Was soll aus uns noch werden Qu’allons-nous encore devenir ?
Uns droht so große Not Un si grand danger nous menace
Vom Himmel auf die Erden Du Ciel sur la Terre
Falln sich die Engel tot Tombent les anges morts
Ach Mutter mach die Augen zu Oh ! Mère, ferme les yeux
Der Regen und die Ratten La pluie et les rats sont là
Jetzt dringt es durch die Ritzen rein Ils pénètrent à travers les fentes
Die wir vergessen hatten que nous avions oubliées.
Was soll aus uns noch werden Qu’allons-nous devenir ?
Uns droht so große Not Un si grand danger nous menace
Vom Himmel auf die Erden Du Ciel sur la Terre
Falln sich die Engel tot Tombent les anges morts
Paroles et musique de Wolf Biermann – Traduction interprétée d’Enki
« Auferstanden aus Ruinen » (Ressuscitée des Ruines) , l’Hymne officiel de l’ancienne RDA, musique de Hanns Eisler
Berlin Est, le 5 octobre 1979, Brejnev est à Berlin pour fêter avec Honecker le trentième anniversaire de la République démocratique allemande. Un jeune photographe, Régis Bossu, a le réflexe de capter le baiser fraternel des deux hommes. la photo va faire le tour du monde et fera en France la une de Paris-Match. Un jeune peintre russe inconnu, Dimitri Vrubel, tombe sur un exemplaire du journal et décide de reproduire la scène sur un grand mur. Ce sera chose faite le 9 novembre 1989 à l’occasion de la chute du mur
Wolf Biermann
L’auteur-compositeur et interprète Wolf Biermann a été une figure emblématique de ma jeunesse, figure éminente d’un « socialisme à visage humain ». Né en 1936 d’un père docker juif membre de la résistance communiste antinazie qui sera assassiné en 1943 à Auschwitz, Wolf qui vit à Hambourg adhère naturellement après la guerre à la Junge Pioniere (Jeunes Pionniers), organisation communiste pour la jeunesse et, à la naissance de la RDA, choisit de vivre dans ce pays. Il y rencontre en 1960 le compositeur et théoricien de la musique autrichien Hanns Eisler, collaborateur de Bertolt Brecht qui aura sur lui une influence déterminante. Le Barlach-Lied rappelle d’ailleurs beaucoup le style musical d’Eisler. Il fonde en 1961 le Théâtre ouvrier et étudiant de Berlin-Est mais va vite rencontrer sur son chemin la censure du régime est-allemand. Suit alors une longue période au cours de laquelle Wolf, adepte de la « solidarité critique » vis-à-vis du régime, va jouer avec celui-ci au jeu du chat et de la souris. Il pensait alors et ceux qui soutenait son action à l’ouest également que le régime pouvait évoluer dans une voie plus démocratique mais en 1976, après un concert à Cologne, il est déchu de sa nationalité est-allemande et interdit de retour. C’est la fin des illusions sur une amélioration possible du régime. Il poursuit sa carrière en Allemagne de l’ouest, critiquant à la fois la RDA et la République fédérale. Il avait coutume de dire à ce sujet « qu’il était passé de la pluie au purin » traduction littérale de l’expression allemande « Jetzt bin ich vom Regen in die Jauche gekommen » (« tomber de Charybde en Scylla »). Il est le beau-père de la chanteuse déjantée Nina Hagen. (voir l’article de ce blog Nina Hagen – Diva de la dér(a)ision.)
Ernst Barlach – Magdeburger Ehrenmal
Ernst Barlach
Le sculpteur expressionniste allemand Ernst Barlach (1870-1938), d’abord belliciste au cours de la Première Guerre mondiale a ensuite milité pour la paix. Il réalisera entre 1918 et 1927 de nombreux monuments aux morts de la guerre dont plusieurs expriment la douleur des mères dont les fils sont morts. Ces œuvres ne plaisent pas aux nazis lors de leur prise du pouvoir en 1933 et plusieurs d’entre elles seront détruites ou déplacées (Güstrow, Magdebourg, Kiel). Une violente campagne appelle au meurtre de l’artiste en 1934 et il est contraint de quitter l’académie prussienne des Arts tandis que 400 de ces œuvres sont retirées des musées allemands considérées comme représentatives de l’Art Dégénéré.
Erika Pluhar
Chanteuse, écrivaine et actrice autrichienne, Erika Pluhar est né en 1939 à Vienne et a étudié au Max Reinhardt Seminar et à l’Académie viennoise de musique et des arts de la scène. Elle chante depuis les années 1970 et a publié son premier livre en 1981. De 1968 à 2010, elle a tourné dans 15 films. Elle a reçu le prix d’interprétation Kammerschauspieler en 1986. Son interprétation du Barlach-lied est tirée de son album Pluhar singt Biermann paru en 1979 dans lequel la chanteuse interprète 12 chansons de Wolf Biermann. Ce dernier avait créé la chanson 11 années plus tôt en 1968 alors qu’il vivait encore en Allemagne de l’Est.